ACOK 06 – Arya II

Chapitre qui fait progresser la narration, mais peu de choses pour moi à se mettre sous la dent en relecture

Dans le flot des réfugiés, on a droit à une jolie formulation

Most came on foot, with their goods on their shoulders and weary, wary looks upon their faces.

Si on a un peu de jugeote, on se dit que Yoren et son groupe vont au devant d’ennuis…. Yoren a l’air très sûr de lui. Vu ce qu’a écrit Yfos, je suppose que Sola a traduit « longsword » en « rapière », meh…

A l’auberge, on peut prendre un bain (mais pas Arya, bien entendu). Cela nous rappelle que l’hygiène du groupe doit être très sommaire (Arya a encore ses puces de Culpucier), les bons repas aussi. Yoren est quand même un meneur d’homme assez habile à ménager des pauses quand il peut.

On apprend aussi que le lord du coin (Mouton ?) est super sévère ou bien que le poivre est cher (et au passage, Yoren dit qu’il n’y en a pas au Mur. Alors qu’ils arrivent à avoir de l’huile d’olive ?).

Sansa et Arya et leur rapport au vin et à la bière. Notons que cela rappelle des souvenirs de Sansa et Ned à Arya

Her father sometimes let them have a cup of beer, she remembered. Sansa used to make a face at the taste and say that wine was ever so much finer, but Arya had liked it well enough. It made her sad to think of Sansa and her father.

C’est l’heure des rumeurs sur les loups qui tuent (et Arya a encore une trop grande gueule). Intéressant, on parle aussi de clans des montagnes. Mais ils sont partis avec Tyrion ? (ou il a divisé ses troupes ?)

“There’s wild men down from the Mountains of the Moon, try telling them you take no part. ”

Puis, Arya est envoyée dehors et part vers la cage des trois détenus. Jaqen est mystérieux mais je n’ai pas l’impression qu’il encourage Arya à titiller les personnes dangereuses. D’ailleurs Gendry aussi dit qu’il a peur. Pour moi, c’est plutôt un signal donné qu’elle prend trop de risques inutiles.

“A boy has more courage than sense,” the one who had named himself Jaqen H’ghar observed. / “Then you’re stupid. They scare me.” The Bull’s hand fell to the hilt of his sword, and Rorge began to laugh. “Let’s get away from them.”

Arya n’écoute pas vraiment, comme c’est étonnant. La violence (ou l’intimidation) comme solution à tout

“Want to fight?” she asked the Bull. She wanted to hit something.

Yoren looked at the blade. “That’s no law, just a sword. Happens I got one too.”

The officer smiled. “Old fool. I have five men with me.”

Yoren spat. “Happens I got thirty.”

But it was a mistake to take his eyes off Yoren, even for an instant. Quick as that, the black brother’s sword was pressed to the apple of the officer’s throat. “Neither’s the one

you get, less you want me to see if your apple’s ripe yet. I got me ten, fifteen more brothers in that inn, if you still need convincing. I was you, I’d let loose of that gutcutter, spread my cheeks over that fat little horse, and gallop on back to the city.” He spat, and poked harder with the point of his sword. “Now.”

The officer’s fingers uncurled. His sword fell in the dust.

“We’ll just keep that,” Yoren said. “Good steel’s always needed on the Wall.”

“As you say. For now. Men.” The gold cloaks sheathed and mounted up. “You’d best scamper up to that Wall of yours in a hurry, old man. The next time I catch you, I believe I’ll have your head to go with the bastard boy’s.”

“Better men than you have tried.” Yoren slapped the rump of the officer’s horse with the flat of his sword and sent him reeling off down the kingsroad. His men followed

Arya II est une évocation des désastres causés par la guerre qui complète la situation évoquée deux chapitres plus tôt dans Tyrion I. En passant, on comprend que la situation ne va guère s’améliorer à King’s Landing où le petit peuple, jeté sur les routes, cherche refuge. Ils n’y trouveront que les taxes assassines mises en place par Littlefinger pour financer l’effort de guerre et la famine entretenue par les Tyrell du Bief (conf. ACOK – Tyrion I).

Pour exceptionnelles que soit ces conditions, elles ne doivent pas nous faire oublier que la grande précarité et l’injustice sont le lot quotidien du peuple. C’est en tout cas comme ça que je lis l’anecdote de Lync qui aimait trop le poivre :

The innkeeper gave them a round of beer on the house. « I had a brother took the black, years ago. Serving boy, clever, but one day he got seen filching pepper from m’lord’s table. He liked the taste of it, is all. Just a pinch o’ pepper, but Ser Malcolm was a hard man. You get pepper on the Wall? » When Yoren shook his head, the man sighed. « Shame. Lync loved that pepper. »

En tout cas, la situation semble empirer à mesure que Yoren et ses recrues progressent. Aux hordes de va-nu-pieds succèdent des hommes armés et menaçants avant que n’apparaissent les premières tombes et que notre petite troupe n’enterre à son tour son premier mort.

Arya noticed the first grave that same day; a small mound beside the road, dug for a child. […] A few leagues farther on, Praed pointed out more graves, a whole row freshly dug. After that, a day hardly passed without one. […] Come morning, when Praed did not awaken, Arya realized that it had been his coughing she had missed. They dug a grave of their own then, burying the sellsword where he’d slept.

Détourner le cliché

La progression d’Arya vers le nord est, d’un point de vue narratif, très efficace : Arya avance à contre-courant ( « She wondered why no one else was going the same way as them » et plus loin « The inn was full of people moving south, and the common room erupted in scorn when Yoren said they were traveling the other way. « You’ll be back soon enough, » the innkeeper vowed. « There’s no going north.« ). Autrement dit, Arya file précisément là où elle ne doit pas se rendre : en plein coeur du danger ! C’est au demeurant un motif répété à l’envie dans de nombreux films de guerre ou post apocalyptique parce qu’il est particulièrement cinématographique. Se faisant, Martin organise un double suspens poussant le lecteur à se demander d’une part ce qui attend Arya plus au nord et d’autre part comment Tyrion pourra gérer l’afflux massif dans la capitale.

Le talent de Martin est de décevoir cette attente et de prendre le lecteur par surprise. Quand le danger survient, il ne vient pas du nord mais du sud sous la figure de manteaux d’or. Et en prime, la suprise est double ! ils ne sont pas là pour Arya mais pour Gendry.

Pour ceux qui n’avaient pas fait le rapprochement dans Arya I à travers son « horned helm » la chose est désormais entendue : The Bull est Gendry, l’apprenti forgeron et le bâtard de Robert Baratheon. On se reportera à ACOK Arya I pour comprendre comment il est arrivé là.

Freak show

Y’a pas à dire, bien qu’ils soient toujours en cage, les monstres sont de sortie dans ce chapitre. Rapidement présentés dans le précédent chapitre d’Arya, ils prennent un peu plus de consistance ici, notamment Jaqen H’ghar.

Biter et Rorge sont des incarnations du Mal. Il n’y aura pas de chemin de rédemption pour eux, c’est clair dès le début. C’est finalement assez rare dans l’univers d’ASOIAF pour être souligné. Ce duo infernal se rendra coupable des pires exactions et naturellement il faudra le meilleur de la chevalerie, incarné par Brienne (« no chance no choice« ) pour les mettre à bas.

Pour Jaqen H’ghar, c’est plus compliqué. Pour exotiques qu’elles soient, ses manières, ses formulations syntaxiques, etc. n’en sont pas moins civilisées. On pourrait presque lui faire confiance jusqu’au moment où on se rappelle qu’il partage une cage avec les deux monstres susnommés et qu’il est toujours en vie… A mon sens, c’est un personnage que l’on peut apprécier pour son côté bad ass mais auquel il est difficile de s’attacher précisément parce qu’il est personne (et les cheveux bicolores franchement…).

Quoi qu’il en soit, à la fin de ce chapitre les deux soeurs Stark ont rencontré un allié destiné à jouer un rôle important (Dontos pour Sansa, Jaqen pour Arya).

Monster freak

La dernière freak du chapitre est bien sûr Nymeria qui est évoquée à travers des rumeurs.

Around the Gods Eye, the packs have grown bolder’n anyone can remember. Sheep, cows, dogs, makes no matter, they kill as they like, and they got no fear of men. It’s worth your life to go into those woods by night. »

« Ah, that’s more tales, and no more true than the other. »

« I heard the same thing from my cousin, and she’s not the sort to lie, » an old woman said. « She says there’s this great pack, hundreds of them, mankillers. The one that leads them is a she-wolf, a bitch from the seventh hell. »

A she-wolf. Arya sloshed her beer, wondering. […] It had been near the Trident that she’d left Nymeria. […] She probably wouldn’t even know me now, Arya thought. Or if she did, she’d hate me.

The man in the green cloak said, « I heard how this hellbitch walked into a village one day . . . a market day, people everywhere, and she walks in bold as you please and tears a baby from his mother’s arms. When the tale reached Lord Mooton, him and his sons swore they’d put an end to her. They tracked her to her lair with a pack of wolfhounds, and barely escaped with their skins. Not one of those dogs came back, not one. »

Comment ne pas noter l’ironie de voir Lord Mooton (Mouton en VF) mener la battue contre Nymeria et sa meute. Sans surprise, ça finit mal pour les moutons…

Les agissements de la meute seront de nouveau relayés plus loin dans la série, notamment dans AFFC en particulier à travers les POV de Jaime et Brienne. Deux éléments reviennent toujours pour souligner le caractère extraordinaire de cette meute : sa monstruosité (« they are demons » ; « a monstruous she-wolf » ; « a she-wolf of monstrous size« ) et l’absence totale de crainte vis à vis des hommes même armés (« a shewolf […] that no trap nor snare can hold her, that she fears neither steel nor fire, […] and devours no other flesh but man. » ; « They’ve lost all fear of men » ; « Armed men in mail and boiled leather, and yet the beasts had no fear of them. »)

Dès lors nombreux sont ceux qui estiment que la meute aura un rôle à jouer dans les évènements à venir. Attaque de l’armée Lannister retournant à Castral Rock après la prise de Vivesaigues ? ou d’une armée provenant d’Essos, celle de fAegon ou plus sûrement encore celle de Daenerys ?Les possibles sont encore nombreux mais on peut sans doute déjà faire une croix sur l’idée que Tyrion succombera sous les crocs de Nymeria.

Cette dernière idée s’appuie sur les relations très compliquées de Tyrion avec les canidés. Il est vrai que les loups ne semblent aucunement apprécier Tyrion ou que les premières lignes de son premier chapitre dans AGOT sonnent comme un bien mauvais présage :

Somewhere in the great stone maze of Winterfell, a wolf howled. The sound hung over the castle like a flag of mourning.

Tyrion Lannister looked up from his books and shivered, though the library was snug and warm. Something about the howling of a wolf took a man right out of his here and now and left him in a dark forest of the mind, running naked before the pack. » AGOT – Tyrion I

Mais les arcs narratifs ont tellement changé depuis 1993, date à laquelle avait envoyé son premier synopsis à son éditeur, qu’il est fort possible, sinon probable que cette idée, peut-être présente à l’origine, ait tout simplement été abandonnée. Une fois qu’on a fait la chasse à tous les présages possibles, il reste encore à dénicher tous les projets avortés ! Ce n’est pas forcément très intéressant pour l’intrigue en cours mais sur les techniques narratives et le côté jardinier de Martin, c’est passionnant. Cela reste toujours sujet à controverse naturellement mais ça peut valoir le coup d’oeil.

En tout cas, quelque soit l’armée visée, une attaque massive de loup emmené par Nyméria déchaînée, ça me botte assez… On sait que Martin a très explicitement indiqué (« You know, I don’t like to give things away. » says Martin, a grin spreading across his face. « But you don’t hang a giant wolf pack on the wall unless you intend to use it. ») que cette meute monstrueuse aura un rôle important dans les tomes à venir… Reste à savoir qui en fera les frais…

Merci Yfos pour cette analyse fouillée du chapitre d’Arya (Arry).

Il est vrai que les aventures d’Arya nous amènent à croiser des gens du peuple. Ici nous sommes loin des châteaux, des lords et de leurs nobles dames richement vêtus, que nous avons l’habitude de rencontrer dans la plupart des PoV.

Je ne suis pas sûre d’avoir reconnu Gandalf. C’est l’homme qui s’est taillé un bâton ? 😉

Au moment de la rixe avec les dangereux criminels dans le fourgon, j’ai dû relire le passage deux fois pour comprendre qui se retrouve assommé d’un coup de latte entre les yeux. En vérité, c’est Rorge qui agresse Arya (il lui jette sa chope de bière à la figure, qu’elle parvient à éviter grâce aux leçons de Syrio, il l’insulte copieusement)  mais c’est Mordeur qui se prend le coup de bâton. Il fait peur à Arya en se jetant sur elle, et elle réagit en le frappant. Sur le moment, je n’ai pas pensé qu’il s’agissait d’un geste gratuit. Arya avait été agressée et elle répliquait avec son savoir-faire de danseur d’eau.

Il est certain que ce n’est pas très malin, les deux hommes sont très dangereux et elle n’a pas intérêt à les provoquer. Elle devrait plutôt les ignorer. Même si Arya sait pertinemment qu’elle ne va pas intégrer la Garde de Nuit. Le chemin reste long jusqu’au Mur, et tant de choses peuvent arriver en cours de route. C’est peut-être le sens de la remarque de Jaqen : « un garçon plus brave que sensé ».

Je n’avais pas remarqué qu’Arya (Arry) s’emmêlait les pinceaux avec son identité. Elle dit aux manteaux d’or qu’elle/il n’est pas une fille (tient donc !), puis elle poursuit en prétendant qu’elle/il est celui qu’ils recherchent. A sa décharge, il doit être difficile de jouer la comédie toute la journée et de se faire passer pour une personne du sexe opposé. De quoi se faire des nœuds probablement.

En tout état de cause, Arya a le courage de se désigner aux manteaux d’or afin d’éviter à un innocent de se faire capturer. Elle connaît mieux ses camarades de route désormais, et elle ne voudrait pas que l’un deux soit arrêté sur un malentendu. Sauf que les manteaux d’or ne veulent pas la fille de Ned Stark, ils sont à la poursuite du bâtard de Robert Baratheon. Un garçon gênant pour la Reine Cersei. La preuve vivante de la bâtardise de ses propres enfants.

• Cette réponse a été modifiée le il y a 3 années et 10 mois par Liloo75.
• Cette réponse a été modifiée le il y a 3 années et 10 mois par R.Graymarch.

Yfos wrote:

Ce qui m’a un peu étonné est le fait que la façon de parler de Jaqen rappelle Syrio à Arya. Normalement, Jaqen devrait pourtant être capable de convaincre ses interlocuteurs qu’il est lorathi et non braavien.

Je vois deux explications possibles à cela (celle que Jaqen aurait menti en prétendant être lorathi ne tient pas la route vu ce que l’on sait de la formation des Sans-Visage) :

• Jaqen est assez doué pour se donner un accent braavien, peut-être dans le but de rassurer Arya en lui faisant entendre un accent qui lui rappelle quelqu’un de confiance (son aspect exclut qu’il se fasse passer pour un nordien).
• Arya confond les accents d’Essos. Elle a encore trop peu d’expérience en la matière pour les distinguer ? Elle  est encore une petite fille.

Question qui reste latente : comment Jaqen a-t-il fait pour empêcher ces bêtes sauvages que sont Rorge et Mordeur de lui sauter dessus ? Il a dû faire quelque chose qui doit vraiment les terrifier…

Dontos n’étant pas réellement un allié de Sansa, je ne sais pas trop quoi dire de Jaqen.

Tu dis ça parce qu’il a son propre agenda ? Qu’il est télécommandé par Littlefinger ?

A mon sens, il n’en est pas moins un allié, la seule personne à qui Sansa peut se confier, la seule qui l’aide à préparer son évasion. Il y a bien une alliance Sansa-Dontos contre le reste de la Cour tout comme il y aura bien une alliance Arya-Jaqen contre les Lannister à Harrenhal.

C’est temporaire, conditionné à une situation particulière, etc. Mais justement l’alliance ce n’est pas l’amitié, un alignement parfait des intérêts ou que sais-je.

Globalement, il est toujours intéressant de mettre les chapitres d’Arya et de Sansa en regard :

Pour échapper au danger, Sansa s’appuie sur les armes traditionnelles de la féminité et de sa classe (courtoisie) tandis qu’Arya dissimule son genre et sa classe en devenant Arry.

Arya est témoin des souffrances du petit peuple provoqués par la guerre des puissants, Sansa sera témoin du soulèvement du petit peuple contre les puissants (émeutes de Port Réal).

• Cette réponse a été modifiée le il y a 3 années et 10 mois par Athouni.
• Cette réponse a été modifiée le il y a 3 années et 10 mois par Athouni.

Lorath est comme Braavos une Cité libre de différentes cultures mais ou se sont imposés des immigrés Valyriens. Pour Arya, faire la différence doit être la même chose que pour moi faire la différence entre l’accent espagnol et mexicain quand on me parle en français. Et encore, moi j’ai la chance d’avoir parlé à plus d’un Espagnol et mexicain dans ma vie, Arya a affaire à ses premiers étrangers du genre.

C’est aussi assez naturel qu’elle n’arrive pas à agir parfaitement et maitriser son rôle en permanence. C’est déjà assez extraordinaire qu’elle parvienne à le faire autant.

Perso, ce chapitre m’a fait un peu penser aux récits de jeunes migrants mineurs qui doivent traverser l’Afrique et la Méditerranée entre les passeurs, les mafieux, les fous dangereux et les autres réfugiés, version médiévale et romancée.

Pandémie wrote:

Lorath est comme Braavos une Cité libre de différentes cultures mais ou se sont imposés des immigrés Valyriens.

Je pense que c’est presque l’inverse, tout en aboutissant à la même conclusion. Certes, comme toutes les cités libres, Lorath et Braavos ont une origine valyrienne, mais ce sont sans doute les plus éloignées de cet héritage : elles sont les plus septentrionales ; Lorath est sans doute la plus pauvre des cités libres (elle semble relativement à l’écart des grandes routes commerciales), elle est isolée, et l’emprise de Valyria y est faible. Braavos est beaucoup plus riche et puissante, mais ayant été fondée par des esclaves valyriens en fuite, là aussi l’héritage valyrien est faible. En fait, étant relativement voisines, elles ont probablement développé deux langues apparentées à partir du haut valyrien, qui doivent sonner de façon similaire aux oreilles d’une jeune Ouestrienne.