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[Critique] Dans les intrigues de Game of Thrones : le nouveau sacre de la fantasy (Clément Drapeau)

[Critique] Dans les intrigues de Game of Thrones : le nouveau sacre de la fantasy (Clément Drapeau)

Le Mur n’est pas uniquement constitué de sœurs et de frères jurés, de vauriens en quête de rédemption ou de sauvageons fuyant l’anxiété de leur monde. Il y a aussi ceux qui viennent à la Garde de Nuit le temps d’une visite. Et Clément Drapeau, tout comme certains seigneurs, rois et reines de Westeros, est de ceux-là. Nous l’avions reçu dans La Garde et Vous, le temps d’un podcast sur L’Attaque des Titans (ou SNK pour les aficionados) où il avait discuté avec Shaoran-kun. Encore une histoire de Mur et des dangers qui rôdent au-delà. « Comme par hasard ! » diraient certains.

Toujours est-il que par un beau matin de printemps, Clément Drapeau nous est revenu, demandant la relecture et une forme d’adoubement de la part de la Garde de Nuit pour son ouvrage intitulé Dans les intrigues de Game of Thrones – Le nouveau sacre de la fantasy, paru chez Third Edition. Quelques sœurs et frères jurés se sont donc constitués en comité chargé de l’écriture d’une préface qui ouvre cet ouvrage et qui rappelle à toutes et à tous le rôle des communautés de fans et la manière dont elles servent ceux qui travaillent sur le sujet de leur passion.

Et de la passion il y en a dans ce livre. Mais pas seulement. Et c’est ce que l’on va détailler ci-dessous.

Les petits plats dans les grands

Édition collector de l’ouvrage chez Third Editions.

Un petit point sur l’objet en lui-même. Le chroniqueur que je suis n’a pas eu l’occasion d’avoir d’autres ouvrages de Third Editions entre les mains, mais le moins qu’on puisse dire c’est que le livre est beau. Et à ce stade de la chronique il me faut bien avouer une chose : je connais personnellement l’illustratrice de couverture, il s’agit de la sœur d’un ami… mais je ne l’ai su que le jour où elle a posté la couverture sur Instagram ! Il s’agit donc de France Mansiaux, qui a signé d’autres couvertures chez Third Editions. L’éditeur rend ici hommage à la composition avec un petit gaufrage qui fait briller le livre, une couverture rigide et un petit signet. Et il ne s’agit que de la version simple !

Pour les collectionneurs, il existe même une édition limitée de l’ouvrage pour 5 euros de plus. Cette fois, on retrouve une couverture souple en plus, qui représente Jon Snow et Fantôme, signée Imad Awan.  Celle-ci est réversible et de l’autre côté se trouve celle de France Mansiaux. A cela s’ajoute la version numérique du livre et un ex-libris d’Imad Awan. De quoi contenter les fans de Jon, donc.

Les mauvaises langues pourraient dire de cette multiplication de partenariats (deux illustrateurs, la Garde de Nuit, entre autres) a pour but de multiplier les apparitions du livre sur les réseaux sociaux plus qu’autre chose. Dans un sens, ils n’auraient pas tout à fait tort, mais force est de constater que le monde du livre, notamment sur Instagram ou sur Tik Tok, est une nuit sombre et pleine de terreur. Et aucune torche ne serait de trop pour éclairer le chemin de la connaissance. Car le livre de Clément Drapeau n’est pas un énième produit marketing pour vendre du papier en surfant sur un phénomène de mode. Il sort de toute façon trop tard pour cela (nous ne sommes plus en 2019) et il est bien plus que cela, évidemment.

S’il ne devait en rester qu’un

La version normale de l’ouvrage, déjà fort jolie

L’ouvrage se présente en trois parties. Une première revient sur la genèse du Trône de fer de George R. R. Martin et sur l’auteur lui-même. La deuxième sur l’histoire de Game of Thrones, depuis ses débuts maladroits jusqu’à sa consécration. Enfin la troisième propose des pistes de réflexion autour de la saga papier comme de la série télévisuelle que ce soit sur le plan historique comme philosophique. Et on peut dire que le plan est à l’équilibre avec environ 70 pages pour chacune des trois parties.

Alors, qu’y trouveront celles et ceux qui ouvriront ce précieux grimoire ? D’abord, une synthèse solide sur le sujet. Clément Drapeau multiplie les recours à différentes sources pour raconter l’histoire de la saga littéraire et de la série télévisée, que ce soit avec des articles ou des ouvrages d’analyse. On trouvera ainsi convoqués Les Mystères du Trône de fer (tome 1 et tome 2) de Thierry Soulard et Aurélie Paci, mais aussi William Blanc, Florian Besson, Justine Breton, Marianne Chaillan et tout un tas de noms que celui ou celle qui l’habitude de ce type de lecture reconnaîtra. Sur la série télévisée, l’auteur évoque également l’ouvrage de James Hibberd, Le feu ne tue pas un dragon, mais loin de le tenir pour une source fiable, il le critique et essaie d’en voir les limites (limites que nous avions soulevées dans un article et un podcast), ce qui donne un aperçu de la pertinence de son propos et sa capacité à remettre en question le storytelling autour de « l’aventure » Game of Thrones pour éviter de tomber dans la bête évocation hagiographique de la série (en reconnaissant sa dimension à exploser des records, bien sûr).

Pour celles et ceux qui connaîtraient déjà un peu ce sujet, il serait facile de se dire « bon ben un ouvrage de plus qui n’apporte rien ». Ce serait à mon sens une erreur. D’abord, parce que Clément Drapeau a pour lui sa plume qui rend cette analyse synthétique très agréable à suivre et bien plus facile d’accès par exemple, que l’ouvrage plus universitaire de Besson et Breton. Ensuite, l’auteur ne se contente pas ici de livrer un résumé bien digéré de 10 ans de publications sur le sujet. Il y ajoute quelques nouveautés bienvenues.

Pour évoquer ces dernières et laisser la surprise des suivantes au lecteur, je me contenterai d’en évoquer deux. D’une part, Clément Drapeau se fend d’une analyse des chapitres couvrant l’événement des Noces Pourpres et des effets littéraires et stylistiques utilisés par Martin pour faire monter le lecteur en pression. Je crois bien qu’à ce jour, c’est la première fois que je vois quelqu’un s’intéresser à ce processus (Thierry Soulard a bien décrypté tout ce qui est de l’ordre de la sémantique, mais moins ce qu’il en est des émotions). D’autre part, Clément Drapeau déconstruit le mythe du « réalisme » supposément historique de la saga, largement employé par Martin et les showrunners de Game of Thrones pour défendre leur vision du Moyen Âge. Cela peut sembler redondant et il n’est pas le seul à le faire (cf. les auteurs cités plus haut). Mais Clément Drapeau ajoute une nouveauté de son cru : l’idée d’une fantasy naturaliste, descriptive, qui vient donner un sentiment de réalité par ce caractère spécifique. Et rien que ce petit développement suffit à donner à son ouvrage un intérêt tout particulier.

Conclusion

Vous l’aurez compris, le chroniqueur que je suis pour cet ouvrage a plutôt été emballé par l’analyse et le récit entremêlés que propose Clément Drapeau au sujet de notre saga préférée et de son adaptation. L’auteur connaît ici ses références et possède une expertise sur le sujet, ce qui laisse le lecteur sur l’impression que finalement, s’il ne devait rester qu’un seul ouvrage d’analyse, si vous souhaitiez n’en lire qu’un, ce serait sans doute celui-ci… avant d’attaquer tous les autres ! Car il s’agit certes d’un minutieux travail de synthèse, mais aussi d’une excellente porte d’entrée pour toutes les autres réflexions autour du Trône de fer, le tout saupoudré de quelques trouvailles. Une lecture solide donc, à conseiller à tous les fans et qui, à titre personnel, me donne envie de me pencher sur son ouvrage consacré à L’Attaque des Titans, une autre saga qui multiplie les parallèles avec notre Trône de fer.

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