[Auteur] Timothée de Fombelle

[DNDM Fléau des AutresPosts : 3152]

Alma, tome 1 : le vent se lève, de Timothée de Fombelle

C’était splendide.

De la littérature jeunesse de 400 pages, et c’est le tome 1 d’une trilogie. Un cadre historique grave et dramatique (l’esclavage, le commerce triangulaire). Deux personnages principaux (et un troisième un peu plus en retrait) dont les histoires ne sont pour l’instant connectées que d’assez loin. Ambitieux, pour un roman jeunesse.

Et oui, cette trilogie est clairement très ambitieuse. Je ne connaissais pas Timothée de Fombelle, donc parlons d’abord de la grosse claque, de ce qui justifie ce « c’était splendide »: le style.

C’est brillant et limpide, c’est imagé et formidablement ouvragé, c’est de la littérature jeunesse qui prend son lectorat très, très au sérieux de ce côté là (y compris côté vocabulaire, souvent très précis). Pour autant, ce n’est pas de l’esbrouffe, du style pour le style, non ; c’est une narration qui reste sur un rythme égal tout du long, mais qui nous submerge inexorablement, vague après vague, comme une marée montante. C’est d’autant plus impressionnant, pour moi, que c’est une narration au présent, avec un narrateur externe, deux choses qui depuis plusieurs années ne me convainquaient guère.

Vous pouvez feuilleter le début du livre ici, pour voir de quoi je parle.

Parlons du fond, maintenant.

Est-ce qu’Alma est un livre historique? Non, c’est un livre d’aventure en cadre historique, et aussi un livre de fantasy très light, mais il faut attendre la page 211 pour en avoir confirmation, même si on peut s’en douter un peu avant.

Le gros de l’intrigue reste historique, néanmoins. On suit donc trois personnages principaux:

Alma, jeune fille noire du peuple Oko, âgée de 13 ans. Elevée par ses parents à l’écart du monde, elle part à la recherche de son frère qui s’est enfui pour voir ce monde mystérieux que leurs parents cachent, au travers des paysages africains.

Joseph Mars, mystérieux jeune garçon blanc de presque quatorze ans, qui s’infiltre sur La Douce Amélie, un navire négrier en partance pour l’Afrique, qui est lui aussi plein de secrets.

Et, dans une moindre mesure, à la Rochelle, Amélie Bessac, la jeune fille blanche qui a donné son nom à La Douce Amélie, qui est donc la fille de l’armateur du navire, et qui se pose des tas de questions sur ce que son père et son comptable/homme de confiance bricolent, tout en essayant de décourager les avances dudit comptable.

Trois personnages, qui ont chacun leur histoire, mais qui nous permettent aussi d’avoir un point de vue sur trois scènes du commerce triangulaire – les victimes, les marins, les armateurs.

Trois personnages qui, pour le coup, sont carrément « bigger than life », peut-être un peu trop pour être crédibles d’un point de vue d’adulte, d’ailleurs: ces trois adolescents sont absolument brillants, surarmés et sur-adaptés pour non seulement survivre à leur environnement respectif, mais aussi pour le dominer. Mais ça, c’est mon point de vue d’adulte, et juger la crédibilité des héros de littérature jeunesse d’un point de vue d’adulte est toujours un jeu un peu vain. Au passage, même s’ils sont surdoués, ces persos n’en sont pas pour autant sans défauts ou sans angles morts – j’ai d’ailleurs très hâte de voir ce que va devenir Amélie Bessac, à ce niveau, la position dans laquelle son personnage est apporte dans cette histoire quelques chose de très intéressant.

Ce que je reproche aux personnages peut aussi être appliqué au scénario: si le mystère autour de la Douce Amélie marche parfaitement d’un point de vue narratif (on a envie de lire pour savoir de quoi il retourne), ça marche moins bien quand on prend du recul et qu’on s’interroge sur la crédibilité de tout cela. Mais bon, là encore, mon point de vue est celui d’un adulte, et qui plus est même entre adultes on peut facilement discuter de ce qui est crédible ou pas.

Bref: des personnages qui peuvent faire rêver les adolescents, un cadre historique très bien documenté, trois histoires en une, du suspense, des mystères en pagaille, une toute légère dose d’imaginaire qui est injectée tardivement mais qui apporte un peu de rêve à tout cela, une volonté de prendre au sérieux les lecteurs et lectrices et de leur faire ressentir la réalité de l’esclavage sans pour autant la montrer trop crûment et être dans la surenchère de violences et d’horreurs, le tout enveloppé dans un style éblouissant.

Ce tome 1 était excellent, je lirai la suite (tome 2 déjà sorti, tome 3 prévu pour 2023).

Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
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[Wylla Patrouilleur du DimanchePosts : 192]

Je suis contente de voir Alma figurer dans ce topic. C’est effectivement un très beau titre de littérature jeunesse.

Je ne sais pas vraiment pourquoi mais j’étais passée un peu à côté du premier, tout en reconnaissant ses nombreuses qualités (beauté de l’écriture de Timothée de Fombelle,  maîtrise indéniable de la narration, grand récit d’aventure, traitement intelligent d’une période historique sensible,…).  Est-ce que ce n’était pas le bon moment, est-ce que c’est parce que je lis pas mal de litté jeunesse pour le boulot et que j’avais trouvé ce tome 1  »académiquement » trop parfait (Timothée Fombelle est un des  »grands » de la littérature jeunesse française et je me souviens ce livre était très attendu au moment de sa sortie) ? Bref, mystère, en tout cas je me souviens l’avoir refermé en me disant  »C’est beau et très bien fait mais je ne lirai pas forcément la suite. » Et bien mal m’en aurait pris car j’ai lu le tome 2, L’Enchanteuse, il y a quelques semaines et que la magie a vraiment opéré : j’ai beaucoup, beaucoup aimé.

Comme dans le premier l’écriture est de toute beauté, et je trouve, d’une grande justesse. Le style est vraiment fluide mais on sent que chaque mot a été choisi avec soin et j’ai été touchée par la poésie de certains passages. La narration omnisciente apporte une dimension universelle au récit et permet aussi de jouer avec la connaissance du contexte historique que peut avoir le lecteur. De mon côté ça a beaucoup joué sur l’empathie que je pouvais avoir pour les personnages.

Je ne veux pas trop en révéler sur l’intrigue, d’autant qu’il s’agit d’une tome 2, mais après un tome 1 qui se déroulait essentiellement en mer on retrouve cette fois nos héros dispersés aux quatre coins du monde (Saint Domingue, la Louisiane, Liverpool ou encore l’Australie), chacun poursuivant sa propre quête. La galerie de personnages s’enrichit de nouveaux venus – fictifs ou historiques – et le côté  »destins croisés » du 1er tome prend encore de l’ampleur, ce que j’ai trouvé très plaisant. Je pense que c’est aussi le développement de cette  »fresque humaine » dépeinte avec sensibilité et justesse par l’auteur qui m’a fait apprécier encore davantage ce second tome, et j’ai vraiment hâte d’avoir le 3 entre les mains.  @DNDM, si tu as lu le tome 2 je serais curieuse d’avoir ton avis :).

J’espère que mon post ne sera pas trop maladroit, c’est la première fois que j’ose poster ici. En revanche je vous lis souvent avec un grand plaisir (et une admiration certaine pour l’habileté de vos critiques) alors merci à vous 🙂

[Nymphadora VervoyantPosts : 8530]

Wylla wrote:

J’espère que mon post ne sera pas trop maladroit, c’est la première fois que j’ose poster ici.

Il est excellent ce post, et vous m’avez tous les deux sacrément donné envie de lire ces livres ^^ Faut pas avoir peur de poster <3

Et ça vaut pour tous ceux qui me lisent ^^ Ne vous autocensurez pas : posts courts, passionnés, longs et érudits, posts de réaction, d'appréciation,... on est sur un forum de discussion, on n'est pas là pour juger d'un style ou d'un fond méga érudit, et pour froncer du sourcil en buvant notre tasse de thé le petit doigt en l'air, on est là pour papoter et échanger sur des sujets qui nous passionnent sans pression !

~~ Always ~~

[Wylla Patrouilleur du DimanchePosts : 192]

Merci beaucoup Nympha <3

[DNDM Fléau des AutresPosts : 3152]

@wylla : Je n’ai pas encore lu le tome 2, mais c’est prévu ! (et assez vite, je pense, mais je sens qu’ensuite l’attente pour le tome 3 risque d’être longue). Je pense aussi lire d’autres livres de Timothée de Fombelle (je pensais commencer par Tobie Lolness, mais si tu as un avis sur le sujet n’hésite pas).

@nymphadora: bonne lecture 😉

Au passage, s’il y a des gens ici qui cherchent encore à cocher la case « roman d’aventure » du Challenge Lecture, c’est un livre qui fait parfaitement le job, et il entre probablement dans d’autres cases aussi).

Et je précise aussi que même si c’est un roman de 400 pages, et le tome 1 d’une trilogie, ça se lit très vite et très bien, j’ai avalé le livre en 3 ou 4 jours je crois. Ca reste 400 pages écrites en gros et bien espacé, et avec une image par chapitre, aussi, donc en nombre de signes ça ne doit pas être si immense que ça.

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[Wylla Patrouilleur du DimanchePosts : 192]

@DNDM Oui il y a effectivement le problème de l’attente ahah.

Tobie Lolness (la trilogie) est son oeuvre la plus connue donc c’est effectivement une bonne idée de lecture si tu veux continuer à découvrir sa plume. J’ai lu le tome 1 il y a fort longtemps mais j’avoue que mes souvenirs sont assez flous. Sinon il y a aussi Le livre de Perle qui est dans ma liste de titres à lire depuis une éternité et dont j’ai entendu beaucoup, beaucoup de bien. En plus c’est un one-shot ce qui peut être appréciable.

Pour Alma je te rejoins complètement, vrai roman d’aventure et facile/rapide à lire.

Sinon je découvre (1000 ans après la bataille, on ne se refait pas) le Challenge lecture. Comme il se finit le 31 Mars ça me paraît un peu tard pour m’y mettre mais je me demandais s’il y aurait une nouvelle édition dans le courant de l’année ? 🙂

• Cette réponse a été modifiée le il y a 2 années et 11 mois par Wylla.

[Nymphadora VervoyantPosts : 8530]

Wylla wrote:

Comme il se finit le 31 Mars ça me paraît un peu tard pour m’y mettre mais je me demandais s’il y aurait une nouvelle édition dans le courant de l’année ?

Oh bah vraisemblablement 🙂 Je m’en vais de ce pas aborder la question dans le topic du challenge, pour papoter de vos envies pour l’an prochain !

~~ Always ~~

[FeyGirl Fléau des AutresPosts : 4419]

Nymphadora wrote:

Wylla wrote:

J’espère que mon post ne sera pas trop maladroit, c’est la première fois que j’ose poster ici.

Il est excellent ce post, et vous m’avez tous les deux sacrément donné envie de lire ces livres ^^ Faut pas avoir peur de poster <3 Et ça vaut pour tous ceux qui me lisent ^^ Ne vous autocensurez pas : posts courts, passionnés, longs et érudits, posts de réaction, d’appréciation,… on est sur un forum de discussion, on n’est pas là pour juger d’un style ou d’un fond méga érudit, et pour froncer du sourcil en buvant notre tasse de thé le petit doigt en l’air, on est là pour papoter et échanger sur des sujets qui nous passionnent sans pression !

Entièrement d’accord avec @Nymphadora : partagez avec nous vos découvertes, car tous les commentaires sont intéressants ! On est pas là pour juger les critiques, mais pour piocher des envies de futures lectures.

[DNDM Fléau des AutresPosts : 3152]

Quasiment un an jour pour jour après le tome 1, j’ai lu Alma tome 2: l’enchanteuse.

Côté plume, on retrouve évidemment ce style limpide qui m’avait marqué sur le tome 1. Après, j’ai néanmoins trouvé ça un peu moins éblouissant que sur le tome 1 – peut-être parce qu’il n’y avait plus l’effet de surprise?

Côté rythme et intrigue, on retrouve la même maîtrise de la narration, avec des chapitres très courts mais qui, parfois, comprennent quatre ou cinq rebondissements en trois pages. Timothée de Fombelle est excessivement doué pour créer une situation, nous faire croire qu’il va se faire passer ce qu’on désire, puis nous faire croire qu’il va en fait se passer ce qu’on craint, puis nous laisser souffler pendant quelques lignes, et alors qu’on croit avoir échappé au drame, nous remettre sur les rails de la catastrophe, et puis poum, à la fin du chapitre en fait il ouvre une troisième voie inattendue, mais pourtant parfaitement logique.

Ceci dit, ce second tome à un petit côté « je tourne autour du pot ». Les protagonistes s’y frôlent continuellement sans réussir à se toucher. On voit du pays, on suit de nouvelles sous-intrigues, on découvre de nouveaux personnages admirables, détestables, et souvent un peu des deux – mais pour ne pas avoir d’effet de lassitude, il faut se rappeller que ces livres traitent, comme l’annonce la quatrième de couverture, de l’esclavage et du combat pour l’abolition de façon générale, et pas seulement du destin de nos petits héros.

Sur les personnages « admirables, détestables ou un peu des deux », ces qualificatifs s’appliquent à pas mal de personnages secondaires, mais il y a surtout le personnage (quasi) principal d’Amélie Bessac, fille d’armatrice qui se retrouve ici à gérer la plantation familiale, à propos duquel je disais ceci suite au tome 1:

DNDM wrote:

Au passage, même s’ils sont surdoués, ces persos n’en sont pas pour autant sans défauts ou sans angles morts – j’ai d’ailleurs très hâte de voir ce que va devenir Amélie Bessac, à ce niveau, la position dans laquelle son personnage est apporte dans cette histoire quelques chose de très intéressant.

Et donc oui, clairement, c’est toujours aussi réussi à ce niveau. Amélie Bessac (et sa gouvernante, Madame de Lô, qui est quasiment une extention de sa personnalité, mais avec son propre caractère très bien défini) est probablement le personnage sur lequel il y aurait le plus à dire et à analyser. J’ai rarement croisé un personnage aussi multiple et réussi, à la fois excessivement compétent et sympathique, dont j’ai envie de voir la réussite, mais qui dans le même temps est d’un aveuglement totalement criminel (mais certes, bien de son temps) sur la question de l’esclavage, et qui a tellement la tête dans ses propres problèmes qu’elle peut se révéler d’un égoïsme, d’une inhumanité, voir quelque part d’une cruauté, assez étonnants pour un personnage principal de littérature jeunesse. J’avais tellement envie de la secouer… Et dans le même temps j’adore comment Timothée de Fombelle prend le contre-pied de tout un tas d’attendus faciles, avec elle.

Bref, toujours une lecture très marquante. Même si sur les destins des personnages ce tome multiplie les circonvolutions qui peuvent paraitre inutiles, dans la toile de fond, on voit bien que l’histoire est en marche, et c’est passionnant.

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Lu Tobie Lolness, dans une intégrale qui rassemble les tomes 1 et 2.

C’est l’oeuvre qui a fait connaître Timothée de Fombelle, c’est quasiment considéré comme un classique jeunesse aujourd’hui, et… J’ai été pas mal déçu, et je me suis un peu ennuyé.

Pitch: Tobie Lolness, préadolescent, fuit son peuple qui veut le tuer. Pourquoi, qui est-il, que s’est-il passé? On va l’apprendre peu à peu au cours de sa fuite vers les basses-branches, fuite qui grosso modo prend une bonne partie du tome 1. Ensuite, il se passera d’autres trucs, bien évidemment. Comme le dit la quatrième de couverture, on va avoir droit à un roman « d’aventure, d’amitié et d’amour », et à ce niveau là, pas de mensonge.

Environnement: un des charmes du livre est que les personnages, bien qu’ils ressemblent et agissent totalement comme des humains vivant dans une société pré-révolution industrielle, font tous moins de 2 millimètres et vivent dans un arbre, qu’ils considèrent comme l’intégralité du monde. L’existence d’autres arbres, où se percheraient les oiseaux, n’est que théorique, et le moindre insecte est soit un danger, soit un bifteck.

Le livre a de gros atouts, mais… J’ai moyennement accroché. Je ne sais pas si c’est la comparaison avec Alma, ou l’aura du livre qui m’en a fait attendre trop? Je n’ai pas retrouvé ici ce qui, dans Alma, m’a séduit.

Le style n’est pas aussi époustouflant.

Les personnages sont pour la plupart désespérement unidimentionnels et clichés. Les méchants sont moches et stupides, les gentils sont beaux et gentils, et comme les méchants sont vraiment très stupides les gentils n’ont pas à être particulièrement imaginatifs pour les mener par le bout du nez, en général un gros coup de bluff suffit.

Le scénario se perd un peu en cours de route – sur le second tome, Tobie Lolness se fait même totalement voler la vedette par d’autres personnages bien plus intéressants et proactifs, à mon humble avis.

L’environnement est sympa, et permet d’amener un propos écologiste toujours bienvenu, mais j’ai néanmoins trouvé ce thème amené avec de trop gros sabots.

Bref. trop d’attente, et au final une semi-déception. Après, ça reste un avis d’adulte bougon sur un livre jeunesse, donc fort possible que ce livre touche chez les préados des cordes sensibles qui chez moi n’existent plus, ou qu’il leur paraisse plus frais.

Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
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Alma (tome 3) – La liberté, de Timothée de Fombelle

J’avais loupé l’info, mais le tome 3 d’Alma est sorti mi-2024. En début d’année, j’avais regardé de temps à autres quand il allait sortir, sans trouver d’info, et il faut croire qu’ensuite ça m’est sorti de l’esprit. Je ne m’en suis rendu compte qu’il était dispo qu’en le trouvant par hasard dans ma bibliothèque.

Donc, suite et fin des aventures d’Alma, Joseph et Amélie – et de tout un tas d’autres personnages rencontrés en cours de route et qui peu à peu ont eux aussi eu droit à leurs chapitres, le casting de cette trilogie racontée en narration omnisciente étant assez foisonnant. Ce troisième tome va nous entraîner de la Révolution française de 1789 jusqu’à la révolte des esclaves à Saint-Domingue de 1791, et évidemment les personnages vont se retrouver au cœur des événements.

Difficile d’en dire plus sur l’histoire sans spoiler.

Parlons ressenti, alors.

C’est toujours une expérience étonnante de terminer une saga en cours de publication. Si on est arrivé jusque là, c’est qu’on a aimé. Mais va t-on aimer jusqu’au bout? Le final va t-il être à la hauteur de ce qu’on espère, voir de ce qu’on s’est imaginé?

Beaucoup d’attentes, peut-être un peu trop de mon côté. J’ai dévoré ce livre de 450 pages en deux soirées, et j’ai goûté de nouveau avec un grand plaisir cette plume qui rend simples et vivants des moments d’histoire ou d’émotion pourtant complexes à retranscrire. Mais sur l’histoire en elle-même, je suis un poil mitigé, à la fois concernant le parcours et la fin (ou les fins, plutôt, vu qu’à peu près tout le casting de personnages principaux, secondaires, ou tertiaires historiques, ont tous droit à la leur, ouverte ou fermée, à une ou deux étranges exceptions près qui auraient pourtant pu être traitées en une ligne, ce qui me chagrine un peu).

C’était passionnant à lire, et en même temps un peu gratuit parfois.

C’est satisfaisant à refermer, mais ça manque peut-être un peu de force, surtout dans un cas qui me tenait à cœur.

Avec des gros spoilers:

Spoiler:

Passionnant à lire mais un peu gratuit parfois:

Pour rendre crédible l’idée qu’une jeune fille noire venue d’Afrique et ayant vécu isolée dans une vallée cachée toute sa jeunesse puisse partir à la recherche de sa famille enlevée et vendue comme esclave à l’autre bout du monde, et finalement les retrouver, que six ou sept personnages éparpillés à travers le monde puissent au final se retrouver au même endroit au même moment, Timothée de Fombelle a eu une idée qui marche plutôt bien : pendant trois tomes les personnages se frôlent sans arrêt sans le savoir, ce qui met une grosse tension tout au long des livres, mais qui aussi crédibilise ce final: vu qu’on a eu un paquet de faux espoirs avant, on est près à croire à l’idée que ces six ou sept personnages qui se sont cherchés de la côté de Guinée jusqu’à Saint-Domingue en passant par New York, Paris, l’Angleterre et j’en oublie, peuvent en fait se retrouver de façon crédible.

Mais cette succession de rendez-vous manqués, qui marchait pas trop mal dans le tome 2, peut néanmoins lasser au bout d’un moment dans ce tome 3.

Satisfaisant à refermer, mais ça manque peut-être un peu de force, surtout dans un cas qui me tenait à cœur:

J’attendais avec impatience de voir ce qu’Amélie Bassac allait devenir, comment Timothée de Fombelle allait se dépatouiller de ce génial personnage de jeune fille intelligente, indépendante et bourrée de répartie, mais en même temps totalement aveuglée par son objectif  direct (sauver sa plantation) ou indirect (rester une femme indépendante), au point de choisir de fermer les yeux sur les souffrances qu’elle laisse infliger à des gens juste sous ses yeux.

Et au final, sa fin n’est pas assez forte et tranchée pour me convenir, ça donne un peu l’impression que justement, il n’a pas réussi à se dépatouiller de ce paradoxe (un perso hautement sympathique et engageant pour un lectorat moderne, dont on a envie de voir la réussite, mais de facto esclavagiste sans recul et qui ne se remet jamais en question à ce niveau). Ça fait de superbes chapitres, tout en contrastes entre les objectifs d’Amélie Bassac et le coût de ses succès, mais ça fait une fin trop facile.

Et tant que j’y suis, une ou deux étranges exceptions près qui auraient pourtant pu être traitées en une ligne, ce qui me chagrine un peu:

On est bien d’accord qu’Abel Bonhomme, et surtout Louis Crampon, disparaissent entre deux lignes sans qu’on ne nous dise expressément ce qu’ils deviennent? Vu le contexte, on peut imaginer ce qu’il en est, mais bon, c’est un peu trop ouvert pour moi, surtout quand à côté le capitaine Lazare Gardel a lui droit aux précisions qui me manquent dans le cas Louis Crampon. J’ai un peu l’impression que la fin a été éditée afin d’accélérer au maximum le rythme et d’arrêter ce jeu de rendez-vous manqués qui devenait un peu lassant, mais que du coup ces deux personnages sont tombés dans une coupe éditoriale malheureuse.

Du coup à lire? Totalement. C’est une splendide trilogie historique avec un tout petit peu de fantasy dedans, la plume est épatante, le rythme ultra prenant, c’est aussi bien adapté aux adolescents qu’aux adultes, et les sujets abordés sont importants. C’est juste que Timothée de Fombelle s’était mis la barre très haut sur certains points, tellement haut que lui-même a du mal à la franchir au final. Mais vous auriez vraiment tort de passer à côté de ces bouquins.

Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
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