Ce que House of the Dragon dit de la société américaine

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  • #181976
    Werther
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    SPOILER saison 1 + FS

    Je suis bien conscient que le sujet que je vais aborder est particulièrement inflammable sur le net. Il ne s’agit que de quelques petites réflexions personnelles sur le lien entre la politique américaine et la série House of the Dragon. Je ne souhaite ni émettre un jugement ni prendre parti, il s’agit simplement d’une tentative d’analyse des influences du monde actuel sur les scénaristes. Évitons donc la foire d’empoigne qui accompagne normalement ce type de discussions. Ne débordons pas du sujet, n’essayons pas d’imposer notre point de vue ou de juger la position de la série. Bref, restons donc cordiaux et essayons d’analyser et de comprendre plutôt que de nous insulter. Merki !

    Bref comme dit Viserys :

    Les œuvres sont-elles écrites dans des tours d’ivoire ?

    Depuis quelques années, des groupes d’internautes dénoncent ce qu’ils appellent une “politisation” des œuvres, notamment de l’imaginaire. Les créateurs de films, séries ou jeux vidéo, sont accusés d’avoir un “agenda” et d’intégrer dans leurs oeuvres des problématiques actuelles. Le cri de ralliement de ces internautes peut souvent se résumer par : “pas de politique dans [insérez nom d’une œuvre] ».

    Cette accusation de “manque d’objectivité” d’une œuvre est en réalité souvent un moyen de critiquer un point de vue avec lequel on n’est pas d’accord. La “neutralité” exigée à corps et à cris par ces internautes, se résume à adopter leur propre vision de la société.

    Surtout, l’argument est biaisé. Sans aller jusqu’au “Tout est politique”, aucune œuvre n’est neutre, aucune œuvre n’est objective, aucune œuvre n’est écrite dans une tour d’Ivoire loin des réalités ou débats politiques qui entourent les auteurs. Les œuvres qui se proclament « neutres » ont elles-mêmes un point de vue et une vision du monde qu’elles véhiculent.

    Bref, une œuvre est avant tout le produit de son temps et dit quelque chose de la société dans laquelle elle a été produite.

    Ce commentaire sur la société contemporaine de l’œuvre peut être assumé et intentionnel. Les créateurs de la série ont été clairs sur leur volonté de diversifier le casting :

    I think it was always the case that we’re making a television show and in a modern world, and we live in a very colorful world and it’s important to represent that that up on the screen.
    Interview avec Ryan Condal, Westeros.org, 28 septembre 2022

    ou d’aborder des questions liées au patriarcat ou aux conséquences des violences sexuelles :

    “I think what our show does, and what I’m proud of, is that we choose to focus on the violence against women that is inherent in a patriarchal system,”
    Sara Hess, Vanity Fair, 2 août 2022

    Cette volonté répond à un besoin de parler aux spectateurs américains actuels, d’avoir une certaine pertinence dans un monde post BLM ou MeeToo. Les réactions hostiles sont elles-mêmes le fruit d’une vision de la société, instrumentalisées par des acteurs qui se proclament apolitiques mais qui ne le sont pas. Bref, elles n’en sont pas moins politiques.

    Ce commentaire peut être également intériorisé par les créateurs. C’est une ambiance, une vision du monde, une culture que l’autrice/auteur peut glisser dans son oeuvre sans en être conscient(e).

    Qu’on le veuille ou non, ou même qu’elles ou ils le veuillent ou non, les autrices/auteurs sont le produit de leur société, de leur époque, de leur milieu social et de leur parcours.

    Ainsi, HotD, malgré son casting britannique, est avant tout une série écrite par des Américains des années 2020, pour des Américains des années 2020.

    Les scénaristes sont eux-mêmes issus d’un milieu américain, souvent aisé de la Côte Est ou Ouest. Cela explique leur forte sensibilité sur certaines questions : diversité ou violences sexuelles. Cela peut, à l’inverse, expliquer quelques non-dits ou l’absence d’intérêt pour d’autres questions. Ainsi la violence physique n’est-elle pas vraiment remise en cause, et les inégalités sociales/de classes, sujet si important sur le Vieux Continent, semblent moins intéresser les autrices/auteurs américains, même progressistes.

    Bref, l’intérêt et le désintérêt des scénaristes pour certaines questions s’expliquent par la société dans laquelle ils vivent et cela a une influence sur leur œuvre. La série HotD, comme tout autre produit culturel, est le fruit d’un imaginaire d’une époque et d’une société.

    A House Divided : la guerre civile dans HotD (et le TdF)

    Barbar et DNDM, dans leur livre sur les influences historiques du trône de fer, ont bien montré que la Danse est fortement inspirée de la Guerre des Deux Roses anglaise. On peut néanmoins penser que GRRM, en tant qu’auteur américain, fait aussi référence, consciemment ou inconsciemment, à un grand traumatisme des USA : la guerre civile.

    Dans l’histoire des nations, il y a certains événements traumatiques qui façonnent la vision qu’ont leurs habitants d’eux-mêmes et des autres. La défaite et l’occupation en 40-44 est par exemple un traumatisme qui ne cesse de revenir hanter les Français, leur vision du monde et de la politique.

    Pour les États-Unis, il s’agit de la Guerre de Sécession (1861-1865) qu’ils nomment eux-mêmes la Guerre Civile (Civil War), conflit le plus meurtrier de leur histoire. Ce traumatisme est encore frais (débats sur les drapeaux confédérés) et structure depuis plus d’un siècle les oppositions politiques (il suffit de regarder les cartes des élections américaines depuis un siècle pour s’en convaincre).

    Malgré leur nom, les États-Unis sont une société particulièrement divisée et cela depuis des décennies : de la ségrégation à la guerre du Vietnam (qui a fortement influencée GRRM), les exemples abondent. La peur d’une guerre civile est insidieuse et se retrouve partout dans la fiction (de la sécession de la Fédération du Commerce dans Star Wars à l’arc Civil War des Marvel).

    Elle se retrouve également dans les écrits de GRRM. Depuis la Conquête, les grandes catastrophes sont pour la plupart des guerres civiles : la guerre de la Foi, la Danse des Dragons, les rébellions Feunoyrs, la rébellion de Robert, la Guerre des Cinq Rois (sujet central de la saga).

    House of the Dragon n’échappe à cette crainte de la guerre civile. Le titre même de la série semble rappeler le fameux discours d’Abraham Lincoln, étudié par tous les petits Américains :

    « A house divided against itself cannot stand. »
    Abraham Lincoln, 1858

    Un élément que reprend d’ailleurs Viserys dans son discours de l’épisode 8 :

    “La Couronne s’affaiblira si la maison du dragon est divisée”
    Viserys Targaryen, épisode 8

    Dans cette optique, House of the Dragon peut être vue comme un commentaire sur la division aux Etats-Unis, notamment depuis les années Trump.

    HotD et la polarisation de la société américaine

    Le succès de la série outre-Atlantique tient peut-être à son thème et son discours qui abordent la question de la polarisation croissante des Etats-Unis.

    Il est assez facile de voir dans les Noirs et les Verts des allégories des Bleus et des Rouges, des partis démocrates et républicains, et le duel Rhaenyra-Aegon comme un nouveau Clinton-Trump. Cette interprétation ne vient pas non plus de nulle part. Pour les créateurs de la série, Alicent est ainsi une Woman for Trump :

    Cooke remembers one direction Condal and Sapochnik gave her for the role of Queen Alicent: « She’s like a woman for Trump. »
    The princess switch: Emma D’Arcy and Olivia Cooke are taking over House of the Dragon, Entertainement Weekly, 21 septembre 2022.

    On remarque ainsi que les personnages Noirs sont les plus en phase avec les idées progressistes :
    -ils sont les seuls à bénéficier du casting inclusif avec les Velaryons ;
    -leur championne est une femme et ils défendent l’égalité face à la succession ;
    -la bâtardise semble moins leur poser de problème ;
    -ils font preuve en général de plus de tolérance envers l’homosexualité (dialogue Rhaenyra-Laenor) ou les liaisons libertines ;
    -même leur côté négatif peut être rapproché des critiques faites envers le parti démocrate, notamment le dédain affiché de Rhaenyra pour le petit peuple…

    Au contraire, les Verts, eux, sont une image des Républicains :
    -ils ont un prétendant masculin et défendent le patriarcat ;
    -ce prétendant est un violeur ;
    -ils sont dévots (les symboles de la Foi et la prière d’Alicent dans l’épisode 8) et hypocrites (Alicent et son fils Aegon) ;
    -ils aiment la violence (Aemond) ;
    -ils sont homophobes (Criston Cole).

    Quel impact sur le récit ?

    Si l’on accepte cette grille de lecture, on comprend peut être mieux le message de Viserys lors du banquet de l’episode 8. Le vœu pieu (des scénaristes) d’une société plus unie où les individus, malgré leurs points de vue différents, vivent ensemble, et font face à un ennemi commun.

    Le fameux E Pluribus Unum (De plusieurs, Un, la plus ancienne des deux devises des Etats-Unis).

    MAIS, et c’est important, ce vœu pieu ne se réalise pas. Surtout les scénaristes sont eux-mêmes le fruit de leur milieu et de leur éducation et privilégient clairement une vision de la société.

    Cela peut expliquer ce fameux déséquilibre perçu par de nombreux spectateurs, entre la représentation des Noirs et des Verts. Les Noirs ont, indéniablement, le Moral High Ground.

    Cela a déjà des conséquences sur le récit, car les Noirs, et surtout Rhaenyra, ne peuvent pas commettre d’actes trop répréhensibles. Seuls quelques éléments isolés (Daemon) peuvent se le permettre. Ainsi du meutre de Laenor à l’exécution de Vaemond, Rhaenyra a été épargnée par les scénaristes.

    Je me demande ce que cela implique pour la suite. Un exemple avec la révolte de Port-Réal dans la dernière saison. Le mouvement de ras le bol de la populace et le massacre des dragons à Fossedragon pourraient être traités comme une révolution (et ils le seraient probablement dans une fiction française). Mais on pourrait faire l’hypothèse que le parallèle avec les événements du Capitole du 6 janvier 2021 est un peu trop tentant. La critique de la foule et des MAGA serait assez pertinente, mais elle changerait également la signification de l’événement.

    Mais je m’avance probablement. En fait, je pense même m’être, à plusieurs reprises, un peu trop avancé.

    Nuances

    Il serait en effet malhonnête de dire que cette grille de lecture n’a pas de sérieux problèmes. D’abord, tous les Noirs ne sont pas des anges. Daemon commet un féminicide, Corlys est attaché au patriarcat. Quant à Helaena, elle est plutôt bien vue (mais remarquons qu’elle ne porte justement pas les couleurs de sa faction)… Et puis, Rhaenyra est-elle présentée de façon si positive ? Je suis peut être de mauvaise foi.

    Cette vision des choses est également dangereuse, elle peut surinterpréter les propos des scénaristes et part du principe que les prochaines saisons ne seront pas plus nuancées.

    Et, si on peut interpréter les scénarios à l’aune des réalités politiques contemporaines, il ne faut pas non plus tomber dans l’excès. Cela reste, avant tout, du divertissement (avec des dragons !).

     

    Voilà, prenez pas trop ça à coeur, je souhaitais juste réfléchir à la question, et cela peut très bien être du pur crackpot. Des becs !

    #181986
    DNDM
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    Une grille de lecture très intéressante, et suffisament nuancée pour ne pas tomber dans la caricature, bravo.

    Je reviens juste sur quelques détails:

    Barbar et DNDM, dans leur livre sur les influences historiques du trône de fer, ont bien montré que la Danse est fortement inspirée de la Guerre des Deux Roses anglaise.

    La Guerre des Deux Roses, c’est davantage la grosse inspiration pour ASOIAF.

    La Danse des Dragons a plutôt pour inspiration très directe la guerre civile anglaise de 1135-1153 connue sous le nom d’Anarchie anglaise (ou parfois de Naufrage), qui oppose l’héritière désignée du trône, Mathilde l’Empresse (Rhaenyra) à son neveu Etienne de Blois (Aegon II).  Les parallèles sont extrêmement nombreux. Mais bon, ce n’est pas le sujet ici. Pour ceux que ça intéresse, l’extrait de « Les mystères du Trône de fer: la clarté de l’histoire, la brume des légendes » que nous avons mis en ligne avant la diffusion d’HotD parle rapidement de ces parrallèles (à partir de la page 11). Le PDF est à télécharger ici. On aurait pu (dû, probablement) en mettre bien plus, il y avait de quoi faire.

    Totalement d’accord en revanche sur le fait que le titre « House of the Dragon » est une référence au discours d’Abraham Lincoln (on a d’ailleurs un encadré à ce sujet, lisible également dans l’extrait ci-dessus).

    Sans aller jusqu’au “Tout est politique”, aucune œuvre n’est neutre, aucune œuvre n’est objective, aucune œuvre n’est écrite dans une tour d’Ivoire loin des réalités ou débats politiques qui entourent les auteurs. Les œuvres qui se proclament « neutres » ont elles-mêmes un point de vue et une vision du monde qu’elles véhiculent.

    100% d’accord, à la nuance près que perso je n’ai aucun mal à dire que « Tout est politique ». Par contre, une oeuvre ne doit pas être uniquement politique (elle est, nottamement, également poétique, au sens très large du terme), sinon c’est un tract. Mais HotD est très loin de tomber dans cet écueil.

    Ainsi, HotD, malgré son casting britannique, est avant tout une série écrite par des Américains des années 2020, pour des Américains des années 2020.

    100% d’accord. J’ai souvent l’impression que les gens considèrent qu’une adaptation audiovisuel d’un livre sera la seule et unique adaptation de ce livre, et que quelque part elle remplacera ce livre dans l’imaginaire commun, et se devrait donc de ne pas exister en tant qu’adaptation, mais en tant que copie animée de l’oeuvre originelle. Cela me parait très étrange comme conception: une adaptation audiovisuelle est le fruit d’un travail d’adaptation, comme son nom l’indique, et évidemment que les gens qui travaillent sur cette adpation vont y imprimer leur patte. Confiez le même livre à Tim Burton ou à Quentin Tarantino, et vous aurez à la fin deux oeuvres très différentes Certes, sur le moment, l’oeuvre audiovisuelle touche souvent plus de personnes que le livre de base ; mais sur le temps long, une nouvelle adaptation finit toujours, tôt ou tard, par proposer une nouvelle version du livre de base, alors que le livre, lui, reste le même. Donc oui, les adaptations sont le résultat de leutr contexte de création, et c’est tant mieux, et si quelqu’un adapte de nouveau la Danse des Dragons dans 30 ans, l’histoire sera à la fois similaire et différente, et ce sera tant mieux.

    Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
    Présentation & autres pub(lications) : www.lagardedenuit.com/forums/sujets/presentation-dndm/

    #181991
    Werther
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    La Danse des Dragons a plutôt pour inspiration très directe la guerre civile anglaise de 1135-1153 connue sous le nom d’Anarchie anglaise (ou parfois de Naufrage), qui oppose l’héritière désignée du trône, Mathilde l’Empresse (Rhaenyra) à son neveu Etienne de Blois (Aegon II).

    Je suis un peu honteux de cette erreur parce que je viens de relire votre livre le mois dernier, et que j’ai lu un bouquin sur la guerre civile anglaise en 2020 ou 2021. Mettons cela sur l’écriture dans le train.

    #181997
    Odeon
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    Super analyse Werther. Je n’avais jamais fais le liens entre la multiplicité des guerres civiles dans l’œuvre de Martin et le traumatisme de la guerre de sécession.

    Je ne pense pas que la série cherche à construire un parallèle Vert/Républicains-Noire/Démocrate plus que par petites touches (Alicent et les women for trump) et à leur place je ne le pousserai pas trop loin puisqu’on est en peine de définir un conflit idéologique asse saillant dans la danse des dragons (à priori les maisons se ralliant aux verts ne sont pas plus conservatrices que celles prenant le parti noire).

    Depuis quelques années, des groupes d’internautes dénoncent ce qu’ils appellent une “politisation” des œuvres, notamment de l’imaginaire. Les créateurs de films, séries ou jeux vidéo, sont accusés d’avoir un “agenda” et d’intégrer dans leurs oeuvres des problématiques actuelles. Le cri de ralliement de ces internautes peut souvent se résumer par : “pas de politique dans [insérez nom d’une œuvre] ». Cette accusation de “manque d’objectivité” d’une œuvre est en réalité souvent un moyen de critiquer un point de vue avec lequel on n’est pas d’accord. La “neutralité” exigée à corps et à cris par ces internautes, se résume à adopter leur propre vision de la société.

    Je vais nuancer un peu avec l’exemple de The Ring of power. Parce qu’ironiquement cette série a reçu bien plus de procès en « wokisme » que Hotd alors que la seconde est bien plus progressiste que la première. Sans nier des phénomènes de crispations identitaires où chacun défends sa petite chapelle, il me semble qu’ils sont amplifiés quand les œuvres sont mauvaises et qu’elle donne l’impression de n’être qu’un agenda politique. La demande de série dépolitisé est peut être aussi celle d’avoir des œuvres ne reposant pas sur de simples principes politiques (ou ne donnant pas l’impression de ne reposer que sur eux).

    N'est pas mort ce qui à jamais dort et au long des ères étranges peut mourir même la Mort .

    #181999
    Crys
    • Terreur des Spectres
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    Merci Werther, l’analyse est intéressante, je me garde ça dans un coin du crâne 🙂

    Pour le Capitole, attention je mets sous balise, car ce point m’interpelle (spoilers épisode 9) :

    Spoiler:
    J’ai l’impression au vu du teasing du prochain épisode que ça pourrait être traité dès lundi prochain dans la scène de couronnement à Fossedragon. Si ce n’est en termes de représentation métaphorique, au moins peut-être d’inspirations d’ambiances.
    • Cette réponse a été modifiée le il y a 2 années et 2 mois par Crys.
    • Cette réponse a été modifiée le il y a 2 années et 2 mois par Crys.
    #182005
    Nymphadora
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    Il est assez facile de voir dans les Noirs et les Verts des allégories des Bleus et des Rouges, des partis démocrates et républicains, et le duel Rhaenyra-Aegon comme un nouveau Clinton-Trump. Cette interprétation ne vient pas non plus de nulle part. Pour les créateurs de la série, Alicent est ainsi une Woman for Trump

    Plus qu’une interprétation par le prisme du conflit républicains/démocrates, j’interprète cette déclaration « women for Trump » comme une façon de définir Alicent comme une de ces femmes conservatrices – généralement aisées et blanches – qui sont tant baignées dans un système patriarcal qu’elle le perpétuent, ne le remettent pas en question (53% des électrices de Trump pensent par exemple que certaines situations anodines sont considérées à tort comme du sexisme par certaines femmes, et généralement, pensent que les mouvements féministes vont trop loin – et les plus mobilisées assument très bien vouloir renvoyer les femmes à des rôles traditionnels). Les « women for Trump » sont un peu les femmes qui marquent contre leur camp, qui se mobilisent pour un type harceleur assumé et qui se complaisent dans un système patriarcal. A mon sens, ce commentaire des créateurs est plutôt à intégrer dans une réflexion sur le féminisme et le patriarcat.

    ~~ Always ~~

    #182007
    Babar des Bois
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    Merci beaucoup pour ce sujet Werther, c’est super intéressant, bien amené et argumenté, je souscris à la plupart de tes propros – avec des nuances / autres interprétations sur les personnages dont je n’ai pas toujours la même vision, mais ça reste un détail. Bien vu pour les costumes d’Helaena, qui reprennent d’ailleurs les couleurs des costumes de Rhaenyra jeune.

    Dans un idée un peu proche, et pour rebondir sur le soulèvement de Port-Réal que tu évoques (Révolution ou Capitole ?), c’est vrai que la foule qui agit en groupe chez George R.R. Martin est dépeinte comme négative : certes les motivations sont légitimes (faim, pression fiscale), mais ces foules soumises à des pulsions violentes, sont facilement manipulables (cf. les différents soulèvements de Port-Réal, dans la Danse ou dans ACOK). Et ça m’a beaucoup fait penser à ce que Martin décrit des grands mouvements des années 70 en Amérique dans Armageddon Ragg (qu’il a lui même vécu) : des motivations plus que légitimes, mais une foule qui peut s’emporter totalement et allez dans des extrémités peu reluisante (les forces de l’ordre en face ne sont mieux décrites).
    Bref, hâte de voir comment ce sera traité dans HotD

    Je vais nuancer un peu avec l’exemple de The Ring of power. Parce qu’ironiquement cette série a reçu bien plus de procès en « wokisme » que Hotd alors que la seconde est bien plus progressiste que la première. Sans nier des phénomènes de crispations identitaires où chacun défends sa petite chapelle, il me semble qu’ils sont amplifiés quand les œuvres sont mauvaises et qu’elle donne l’impression de n’être qu’un agenda politique

    Pour le coup, TROP s’est pris des vagues de haines bien avant la sortie de la série. Au moment du dévoilement des affiches promotionnelles et du casting.

    #hihihi
    Co-autrice : "Les Mystères du Trône de Fer II - La clarté de l'histoire, la brume des légendes" (inspirations historiques de George R.R. Martin)
    Première Prêtresse de Saint Maekar le Grand (© Chat Noir)

    #182011
    Alain Robbés-Pierret
    • Éplucheur avec un Économe
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    Un post liminaire d’une grande qualité pour commencer une discussion très intéressante.

    Je n’avais pas du tout perçu, en dehors des échanges déjà établis ici, cette lecture politique étasunienne des événements. Si ce n’est l’assumé « I believe you » de cette semaine et tout le discours contre le patriarcat que la série construit (mais il s’applique malheureusement très bien partout). Mais le parallèle avec la Woman for Trump d’Alicent m’avait un peu échappé. Globalement, tout ce qui est construit sur la politique américaine ou son Histoire (Civil War) m’a échappé et cela m’intéresse ce que tu en dis. Notamment sur Lincoln mais aussi sur un éventuel écho de l’attaque du capitole…

    Il y a des événements qu’on retrouve en écho plus ou moins fort dans le cinéma, et les séries. On peut penser à l’assassinat de Kennedy (qui au delà de ses représentation a apporté un pur cinéma de la paranoia, de la déchirure dans les années qui ont suivi avec l’émergence du Nouvel Hollywood), le 11 septembre et cette attaque du capitole va surement effectivement avoir des répercussions artistiques.

    Odeon : Pour le coup, Rings of Power (que je trouve très moyenne au demeurant, avec un vrai soucis de scénariste) se prend une vague de critique « anti woke » assez abusée à mon sens car la série ne porte aucun message politique ou militant, ni dans ses thèmes, ni dans ses représentations et elle subit juste le fait d’avoir un Elfe ou un Hobbit noire de peau. Mais avant un agenda politique, il y a surtout une envie de représentation capitalistique pure. S’adresser au plus grand nombre, c’est engranger plus d’argent (ou pas, il n’y a pas de recette magique). C’est ce qu’on fait les studios hollywoodien depuis toujours et le feront toujours vu que l’industrie prime (et après des auteurs creusent leur trou militant et politique dans cet espace aussi et tant mieux).

    Mais bizarrement, cela dérange les gens seulement quand il s’agit de mettre un noir ou un homo dans un rôle. Bizarre.

    #182023
    Odeon
    • Pas Trouillard
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    Vos hypothèse sur une éventuel « prise du capitole » comme modèle soit pour le couronnement d’Aegon II soit pour le sac de Fossedragon m’inquiètent un peu.

    Les scénaristes sont eux-mêmes issus d’un milieu américain, souvent aisé de la Côte Est ou Ouest. Cela explique leur forte sensibilité sur certaines questions : diversité ou violences sexuelles. Cela peut, à l’inverse, expliquer quelques non-dits ou l’absence d’intérêt pour d’autres questions. Ainsi la violence physique n’est-elle pas vraiment remise en cause, et les inégalités sociales/de classes, sujet si important sur le Vieux Continent, semblent moins intéresser les autrices/auteurs américains, même progressistes.

    Un point m’avait marqué dans l’épisode 4 : au cours d’un spectacle de rue Rhaenyra découvre qu’une importante parti du peuple (ou du moins Port-Réal) est opposé par principe à son ascension sur le trône et lui préfère Aegon II sur la simple base qu’il est un garçon.
    Or c’est une modification par rapport à F&B où Rhaenyra semble jouir d’une bonne réputation (n’est elle pas surnommé « la joie du royaume ») et où sa prise de pouvoir est d’abord accueilli favorablement (Aegon II étant peu populaire), avant que sa politique fiscale et les peurs générées par une période plus que troublée ne liguent la foule contre elle.
    De là à dire que Hotd a un biais contre les milieux populaires jugés pas asse progressistes par les scénaristes il n’y a qu’un pas.
    Pas que je ne franchirais pas, en espérant sincèrement que la série suivra mon exemple. ^^’

    N'est pas mort ce qui à jamais dort et au long des ères étranges peut mourir même la Mort .

    #182026
    Nymphadora
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    Un point m’avait marqué dans l’épisode 4 : au cours d’un spectacle de rue Rhaenyra découvre qu’une importante parti du peuple (ou du moins Port-Réal) est opposé par principe à son ascension sur le trône et lui préfère Aegon II sur la simple base qu’il est un garçon.
    (…)De là à dire que Hotd a un biais contre les milieux populaires jugés pas asse progressistes par les scénaristes il n’y a qu’un pas.

    A mon sens, cette scène est justement une dénonciation de l’attitude de Rhaenyra : tu sens à ce moment là que tu es face à une « erreur qui va lui coûter cher », un défaut mortel du personnage tragique qui va l’amener à sa chute… Y voir un mépris des milieux populaires me paraît assez à côté du propos.

    ~~ Always ~~

    #182030
    lilou black
    • Frère Juré
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    Plus qu’une interprétation par le prisme du conflit républicains/démocrates, j’interprète cette déclaration « women for Trump » comme une façon de définir Alicent comme une de ces femmes conservatrices – généralement aisées et blanches – qui sont tant baignées dans un système patriarcal qu’elle le perpétuent, ne le remettent pas en question (53% des électrices de Trump pensent par exemple que certaines situations anodines sont considérées à tort comme du sexisme par certaines femmes, et généralement, pensent que les mouvements féministes vont trop loin – et les plus mobilisées assument très bien vouloir renvoyer les femmes à des rôles traditionnels). Les « women for Trump » sont un peu les femmes qui marquent contre leur camp, qui se mobilisent pour un type harceleur assumé et qui se complaisent dans un système patriarcal. A mon sens, ce commentaire des créateurs est plutôt à intégrer dans une réflexion sur le féminisme et le patriarcat.

    Je suis assez d’accord. Pour moi, « Women for Trump » était un exemple. Il existe des femmes satisfaites des sociétés patriarcales dans lesquelles elles vivent partout dans le monde et qui en reproduisent le modèle.

    Je vais nuancer un peu avec l’exemple de The Ring of power. Parce qu’ironiquement cette série a reçu bien plus de procès en « wokisme » que Hotd alors que la seconde est bien plus progressiste que la première. Sans nier des phénomènes de crispations identitaires où chacun défends sa petite chapelle, il me semble qu’ils sont amplifiés quand les œuvres sont mauvaises et qu’elle donne l’impression de n’être qu’un agenda politique. La demande de série dépolitisé est peut être aussi celle d’avoir des œuvres ne reposant pas sur de simples principes politiques (ou ne donnant pas l’impression de ne reposer que sur eux).

    Je pense que ceux qui ont intenté un procès « woke » aux Anneaux de Pouvoir se sont justifiés avec une soi-disant connaissance de l’univers. Les gens ont vu les films de Peter Jackson, ils savent qu’il n’y a pas de personnages de couleur dedans, et du coup, un elfe noir, bouuuuuh, le wokisme a encore frappé. Concernant House of the Dragon, les personnages de couleur, ce sont les Velaryon qui sont, quand on n’a pas lu les livres, des personnages inédits. On ne les voit pas dans Game of Thrones, pour autant que je le sache. Et comme, dans Game of Thrones toujours, tous les acteurs n’étaient pas caucasiens, j’imagine que c’est… « mieux passé » ? Bref, ce n’était qu’une théorie…

    J'ai fixé le ciel étoilé mais hélas le ciel m'a semblé trop haut pour mon rêve (Cantique païen)

    #182107
    Dohaeris07
    • Frère Juré
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    Merci beaucoup Werther

    C’est un régal de plonger dans (vos/tes ?) réflexions et qu’est ce que c’est bien écrit !

    #182112
    Liloo75
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    C’est un super article Werther. Bravo !

    Je n’avais pas pensé au clivage démocrates/républicains pour faire un parallèle entre les Noirs et les Verts. C’est une analyse pertinente.

    Au sujet de la Guerre de Sécession, je partage ton constat. C’est une période qui a beaucoup marqué les américains, d’autant plus qu’elle a des répercussions aujourd’hui encore dans la société US. Un peu comme l’Europe, qui vit avec les conséquences (bonnes ou mauvaises) et le souvenir de la Seconde Guerre Mondiale.

     

    - De quels diables de dieux parlez-vous, lady Catelyn ? (…) S’il existe vraiment des dieux, pourquoi donc ce monde est-il saturé de douleur et d’iniquité ?
    - Grâce aux êtres de votre espèce.
    - Il n’y a pas d’êtres de mon espèce. Je suis unique.

    #182165
    Wedge3340
    • Frère Juré
    • Posts : 88

    Je pense que très clairement le clivage entre le clan des Noirs et des Verts se fait effectivement sur la règle implicite de la préférence masculine. Le Patriarcat pèse de tout son poids dans la conception des seigneurs et dames de Westeros et d’Essos. Et la Reine Alicent, surtout dans la version HBO, est imprégnée, très imprégnée des notions de devoir et de religion qui encadrent une vision rigoriste du monde et de la place des femmes. En fait Alicent applique les mots amers d’Aemma dans le premier épisode. Les femmes sont des corps à marier, et des machines pour reproduire les lignées. Mais Alicent fait plus que ça. Surtout depuis sa colère de l’épisode 7. Elle co-gouverne son clan avec son père.

    Est elle pour autant une incarnation du conservatisme face à l’incarnation du Me TOO, et des autres mouvements émancipateurs comme le BLM.

    Il n’est sans doute pas anodin que les acteurs et actrices racisées soient dans le camp de Rhaenyra. Les même sont suffisamment brillant.es pour incarner également des membres du clan des Verts. Mais c’est dans le camp des Noirs qu’on trouve la version racisée de la famille Velaryon. Et cela pourrait aller dans le sens de la thèse soutenue.

    Cependant le miroir d’Alicent, Rhaenyra ne s’en distingue que parce qu’elle est libre de son corps et de ses idées. Elle a des coucheries. Elle n’hésite pas au pêché du Tonton. Mais est elle pour autant une incarnation du féminisme contre l’obscurantisme?

    Rhaenyra est dépeinte de deux façons. Une princesse ambitieuse, longtemps mise de côté. Mais déterminée à appliquer ses droits. Et d’autre part comme une femme prisonnière du devoir d’une prophétie. De la religion privée des Targaryens. Et au delà de l’affection évidente pour son oncle, il y a chez elle un calcul conservateur dans son union avec Daemon.

    Et Rhaenyra dans le présent de la série.. ne cherche pas à casser la roue patriarcale, comme le prétendait Dany the mad queen de HBO. Elle intègre totalement les notions de lignées, de pureté, d’illégitimité. Elle joue avec ces règles. Et elle est prête à tuer ou faire tuer si on met en doute sa  » droiture « , la légitimité de ses enfants. Certes, il y va de sa sécurité, de celle de sa famille.. mais je ne vois pas la finalement un point de vue très différent de celui d’Alicent.

    Et quand on observe enfin les actes futurs de Rhaenyra. Quand on pense aux enfants de Aegon. A Mysaria, à la sauvageonne dragonnière, à sa façon de régner à Kings landing… Elle est tout aussi Trumpesque que Alicent.

    La réalité du clivage souligné dans ce thread, je pense n’est pas propre à l’Amérique mais au questionnement de nos sociétés occidentales alors que les religions sont en recul mais revanchardes, l’économie en catastrophe, et que nous aurons un choix à faire entre conservatisme, extrémisme ou de grands changements. Et ce clivage s’incarne moins dans la distribution des cartes de la série dans le jeu du trône que dans les discours sur cette série, celle de ROP….. sur leurs éléments inclusifs.

    #182180
    Le crapaud de Lancehélion
    • Éplucheur de Navets
    • Posts : 15

    Je suis d’accord avec beaucoup de points soulevés ici et je ne peux m’empêcher de trouver les parallèles tentés très maladroits.

    C’est normal que toute œuvre de fiction soit imbibée de pensées et opinions politiques mais là le contexte politique de l’Amérique actuelle des créateurs est appliquée presque à gros traits de pinceau.

    Prenons le cas du personnage d’Alicent en électrice de Trump (donc femme blanche privilégiée) qui est dépeinte comme oppresseur face à notre héroïne Targaryen dépeinte comme opprimée. Tout ce truc tombe à côté de la plaque parce qu’à Westeros Alicent est l’inférieure de Rhaenyra sur tous les plans. Rhaenyra est une pure valyrienne (race considérée comme supérieure au sein de l’univers et par la plupart des fans) alors qu’Alicent n’est qu’une andale commune, Rhaenyra est une princesse de sang alors qu’Alicent n’est que la fille d’un frère cadet d’un seigneur mineur, Rhaenyra est une chevaucheuse de dragon et héritière du trône alors qu’Alicent n’est que l’usine à bébés du roi. On peut même dire que c’est Rhaenyra la femme la plus privilégiée de Westeros. Elle est censée être « punk rock » mais sur le papier elle est plus Chelsea Clinton que Janis Joplin.

    Et Rhaenyra n’a pas plus de raison d’être féministe qu’Alicent car dans les livres il ne viendrait jamais à l’idée de ces deux nobles de percevoir les femmes en dehors de leur classe sociale comme leurs égales et de souhaiter leur émancipation.

    Si on avait eu à la barre des créateurs originaires d’un autre pays que les States, en particulier d’un pays marqué par des régimes monarchiques successifs, alors je pense que le sous texte politique aurait été différent. Par exemple, plutôt celui d’une confrontation entre monarchie absolue reliée au divin défendue par les Noirs et monarchie plus constitutionnelle (grossièrement parlant) qui arrange les intérêts privés des seigneurs mineurs comme Otto défendue par les Verts. Cette idée est même présentée en filigrane lors de la discussion du conseil restreint de l’épisode 6 avec Rhaenyra qui souhaite établir une autorité forte de la Couronne dans le Conflans alors qu’Alicent préfère déléguer cette autorité aux Tully.

    Je ne dis pas que la série en aurait été meilleure mais la dimension politique en aurait peut-être été plus fine.

    #182223
    DroZo
    • Terreur des Spectres
    • Posts : 1713

    Je pense qu’il ne faut pas aller non plus dans la sur interprétation. Quz House of the Dragon transpire de la vision de la société qu’ôt ses auteurs américains c’est normal : c’est le cas de toutes les Œuvres de fiction. Il ne faut pas pour autant faire de cette série un tract politique. Ce serait lui accorder des intentions qui ne sont pas les siennes

    Typiquement placer la vision Verts = Républicains et Noir = Démocrate est vachement fausse. Du côté Vert on a quand même le « je te crois » d’Alicent qui fait vachement MeToo. On a un noir à leur conseil restreint (le Grand Mestre Orwyle) et un certain non interventionnisme dans les affaires extérieurs.

    À l’inverse, chez les Noirs nous avons Daemon qui nous est introduit par des violences policières bien hardcore, qui semble ne pas aimer sa première femme uniquement par e qu’elle n’est pas une Valyrienne (bonjour le racisme). Et on a eu plusieurs épisodes de Rhaenyra qui dit « ouin ouin c’est trop dur d’être une princesse héritière, même les paysans ils ôt une meilleure vie que moi » alors que tout le monde autour d’elle (Criston, Alicent…) lui dit « meuf, tout le monde voudrait être à ta place ». D’ailleurs, Rhaenyra ne fait rien pour l’égalité des chances : sa philosophie est c’est moi qui décide et les autres « n’auront pas le choix ».

    En fait, je ne pense pas que les scénaristes ôt essayé de créernune opposition Conservateurs vs Peogressistes mais plutôt une opposition Valyria vs Villevieille. Villevieille étant le siège de la Foi, les Verts sont donc très pieux et moralisateurs. Et Valyria étant inspiré de la décadence de l’Empire Romain dans l’imaginaire, les Noirs sont donc beaucoup plus libertaire sur les questions de la sexualité (en témoigne les peintures érotiques sur les murs) mais également beaucoup impérialistes, racistes (la race Valyrienne est clairement supérieure, qu’ils soient noirs ou blancs) et l’êgalité des chances n’est clairement pas ce qui les préoccupe (le peuple ne vejt pas de Rhaenyra ? Pas grave, ils n’ajront pas lz choix).

    Pour moi, et je rejoins Werther, l’influence de la culture américaine sur le scénario ee fait de façon plus eubtile et inconsciente. Déjà dans les livres de Martin, le soulèvement qui a mis les Moineaux au pouvoir dans AFFC ressemble plus à des sitting à la « Occupied Wall Street », et le soulèvement du Conflans via la Fraternité sans Bannière m’a toujours plus évoqué une bande de hyppies armés mais pacifiste qu’un maquis durant l’occupation allemande. Quant à avoir une vision héroïque avec des barricades des émeutes de Port-Réal à la Les Misérables, là encore on est dans un imaginaire plus européen qu’américain.

    Je m’interroge également sur le traitement de la religion dans cette série. Bien qu’un des deux clans principaux s’en revendique très fortement, je trouve que son influence est curieusement très en retrait. En gros la foi se limite ici seulement à son aspect moraliste. Mais si on retire cet aspect il ne nous reste pas grand chose. Une quelconque solidarité envers les plus faibles et les plus démunis, même de façade, n’est jamais évoqué. Mis à part des expressions toutes faites comme « les Sept soient loués » et un vague bénédicité au début du dernier repas de Viserys, on n’a quasiment jamais de moments où les personnages pensent que les dieux pourront ou non avoir une influence sur leur vie. Il n’y a aucune forme de qpiritualité’ on ne voit aucun rite, et même quand les Verts tiennent le Conseil on n’a aucun septon à leur conseil, ce qui montre la faible importance qu’a la Foi sur ce monde comparé à celle qu’elle a eu surant notre histoire européenne. Comme si être pieux et afficher ostensible même sa religion sur le paoier peint suffisait. Je sais pas si on peut y voir un parallèle avec la religion protestante aux états-unis, mais je pense qu’un européen aurait traité le sujet différent, plus en profondzur peut-être.

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    A.k.a. Fanta le Fantôme avec des bulles dans DOH10.

    #182226
    Odeon
    • Pas Trouillard
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    Typiquement placer la vision Verts = Républicains et Noir = Démocrate est vachement fausse. Du côté Vert on a quand même le « je te crois » d’Alicent qui fait vachement MeToo. On a un noir à leur conseil restreint (le Grand Mestre Orwyle) et un certain non interventionnisme dans les affaires extérieurs.

    Les républicains ont montré qu’il pouvait tenir un discoure de non-intervention (« America first ») et il y existe des discoures conservateurs non-interventionnistes (« préservons les traditions locales ») et des discoures progressistes belliciste (« imposons le progrès au monde »).
    Mais je te rejoins sur le fait qu’il n’y a très probablement pas de volonté de pousser une analogie républicains/démocrate autrement qu’asse  inconsciemment. J’en tiens pour preuve que face aux accusations de complaisance vis à vis des violences sexuels les show-runners ont avancé l’argument du « on représente le Moyen-Age comme il était » (ce qui a fait hurler les médiévistes) au lieu de dire la chose la plus raisonnable qui eut été : « ces violences font partis des thèmes de la série qui parle en grande partie de notre époque et de ses questionnements sur la place des femmes dans l’Histoire. »

    Je m’interroge également sur le traitement de la religion dans cette série. Bien qu’un des deux clans principaux s’en revendique très fortement, je trouve que son influence est curieusement très en retrait. En gros la foi se limite ici seulement à son aspect moraliste. (…) Je sais pas si on peut y voir un parallèle avec la religion protestante aux états-unis, mais je pense qu’un européen aurait traité le sujet différent, plus en profondzur peut-être.

    Critique qu’on peut aussi faire au livre d’ailleurs. Mais je doute que ça soit due au protestantisme américains qui est encore asse puissant aux USA, juste à un désintérêt des thèmes religieux par rapport à ceux de la politique, de l’amour, de la guerre etc.
    Mais oui tout ça manque d’un Septon Eustace. ^^

    N'est pas mort ce qui à jamais dort et au long des ères étranges peut mourir même la Mort .

    #182262
    Nymphadora
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    on a quand même le « je te crois » d’Alicent qui fait vachement MeToo.

    On l’avait déjà dit dans la discussion de l’épisode 8, mais faut arrêter de dire que le « je te crois » d’Alicent est le pinacle du MeToo, et qu’elle a une attitude « féministe » dans ce segment parce qu’elle a dit un mot-clef : cette scène c’est l’illustration du fait que ce n’est pas suffisant, et la mise en œuvre sous vos yeux d’une mécanique de réduction au silence des victimes. Alicent détruit psychologiquement la victime juste derrière, et, à aucun moment, ne prend la moindre action pour éviter qu’il y en ait d’autres. Demandez au paquet de femmes qui se sont confiées à une personne d’agissement d’un boss, d’un collègue, d’un proche… Elles étaient crues par leur responsable syndical, leur responsable RH (qui recevait les mêmes plaintes de pleins d’autres femmes), leur ami : mais elles n’étaient pas protégées, elles étaient réduites au silence (et parfois payées pour le faire dans le cas des « gros » harceleurs) et on leur disait « ne parle pas, personne ne te croira et tu vas ruiner ta carrière ». Le « je te crois » de me-too, c’est le « je te crois » du grand public, le « je te crois » du système qui soit disant allait détruire la carrière de ces femmes : c’est dire aux femmes, non ne soyez pas silencieuses. C’est pas les mots creux du complice qui couvre les actes d’un violeur. Ce n’est pas parce qu’on entend un mot clef qu’il faut pas réfléchir à ce qui nous est montré.

    ~~ Always ~~

    #182281
    JN
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    Merci Werther pour ce post exhaustif. C’est une perspective intéressante.

    Je suis assez d’accord. Pour moi, « Women for Trump » était un exemple. Il existe des femmes satisfaites des sociétés patriarcales dans lesquelles elles vivent partout dans le monde et qui en reproduisent le modèle.

    Ajoutons également qu’il s’agissait d’une directive de jeu, précisément pour aider Olivia Cooke – c’était un exemple comme tu dis, une idée, lorsque cela a été dit ce n’était pas pour que ça se retrouve forcément en interview, ce n’est pas un propos direct sur le personnage qui est censé avoir une signification très profonde.

    On l’avait déjà dit dans la discussion de l’épisode 8, mais faut arrêter de dire que le « je te crois » d’Alicent est le pinacle du MeToo, et qu’elle a une attitude « féministe » dans ce segment parce qu’elle a dit un mot-clef

    +1

    « Edmond Dantès. Nice name. It’d look great in print, you know? Although ‘Le Comte de Monte-Cristo’ would make a better title for a novel. » - Dumas, Fate/strange fake

    #182285
    Corondar
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    Ce qui est intéressant aussi je trouve c est qu au final la série montre que la défense de la pureté du sang peut se faire au delà de la couleur de peau.

    Dans le lore de la série le fait que les Velaryon soient noirs est considéré comme admis, et ce qui compte uniquement c’est leur ascendance valyrienne. Et d ailleurs, c’est aussi un joli pied de nez que le personnage le plus obsédé par la pureté du sang, et le plus ouvertement xénophobe (il est très hostile à tout ce qui n est pas purement valyrien) soit Vaemond Velaryon .

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