Ursula K. Le Guin

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  • #204448
    Lapin rouge
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    Je viens de finir mon premier bouquin de cette autrice, et avec l’ardeur des néophytes, j’en profite pour créer un topic qui lui soit consacré.

    Quelques mots sur sa biographie : Ursula Kroeber est née en 1929 en Californie. Ses deux parents étaient ethnologues, spécialisés dans l’étude des peuples amérindiens. Elle a connu son mari, Charles Le Guin (qui était américain lui aussi, mais dont le patronyme est d’origine bretonne), en France. Elle a écrit de nombreux romans de SF et de fantasy, certains formant des cycles (dont celui de Terremer) et d’autres indépendants. Elle a remporté de nombreux prix (8 Hugo, 6 Nebula et 24 Locus). Elle est décédée en 2018.

    L’œuvre d’Ursula K. Le Guin a déjà fait l’objet de plusieurs billets de blog et posts dans ce forum, écrit surtout par FeyGirl, fervente lectrice :

    J’espère n’avoir oublié aucune contribution.

    Voilà pour l’introduction. J’ai donc commencé le cycle de Terremer (cycle de fantasy) par « Le Sorcier de Terremer » (1968), qui est le premier roman publié (mais deux nouvelles isolées du cycle sont parues avant) dans cet univers. Celui-ci est un vaste archipel, peuplé par des humains (pas de races intelligentes non-humaines dans ce premier cycle, si on excepte les dragons, fort rares) vivant dans une civilisation médiévalisante (mais avec une féodalité absente, ou très discrète). Le personnage principal, Ged, est un jeune garçon au début du roman. Fils de forgeron, il vit dans un village pauvre et isolé. Il se découvre tôt un talent pour la magie (relativement fréquente dans cet univers) et se retrouve d’abord instruit par le mage de son île, avant de partir pour l’académie de magie, située dans une autre île.

    Voilà pour la situation de départ. « Le Sorcier » est donc un roman d’apprentissage assez classique. Pour le lecteur d’aujourd’hui, il peut sembler banal, voire plat. Il était assez novateur à son époque, d’abord parce que son personnage principal et plusieurs des protagonistes sont de couleur, et ensuite parce que, contrairement à beaucoup d’œuvres de fantasy, il n’y a pas de « seigneur des ténèbres » à abattre par le héros. Mais ce qui rend ce livre toujours lisible actuellement, c’est d’abord la plume de son autrice, qui allie réalisme et lyrisme. Ses personnages sont très humains, leurs réactions sont décrites avec empathie et justesse. A ce titre, « Le Sorcier » m’a parfois rappelé « La Tapisserie de Fionavar ».

    En synthèse ce premier roman du cycle ne m’a pas bouleversé, mais j’ai apprécié cette découverte pour sa qualité narrative, et j’ai envie de poursuivre mon exploration de Terremer.

    They can keep their heaven. When I die, I’d sooner go to Middle Earth.
    #204456
    DNDM
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    J’avais également parlé de l’excellent Les dépossédés dans les recos.

    Et on a aussi parlé d’Ursula Le Guin dans le topic De la place des femmes dans les littératures de l’imaginaire.

    Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
    Présentation & autres pub(lications) : www.lagardedenuit.com/forums/sujets/presentation-dndm/

    #204959
    Lapin rouge
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    Merci DNDM pour ce complément.

    J’ai poursuivi mon voyage en Terremer avec « Les Tombeaux d’Atuan », paru en 1971, deuxième roman du cycle (traduction Philippe R. Hupp, Françoise Maillet et Patrick Dusoulier).

    A l’âge de cinq ans, la jeune Tenar, habitante des îles Kargues, archipel isolé au nord-est de Terremer, est retirée à ses parents par des prêtresses, car elle est la réincarnation d’Arha, la Première Prêtresse des Innommables, entités anciennes et redoutables. Elle est éduquée dans le Lieu des Tombeaux, complexe religieux isolé groupant plusieurs temples et bâtiments de service, où vivent les prêtresses et les novices, protégées par des gardes et servies par des eunuques. La vie y est austère et rude, mais Arha prend son rôle très au sérieux. Elle apprend les secrets du Labyrinthe, un ensemble de grottes et de dédale de couloirs souterrains, dont certaines parties sont interdites à tout autre qu’à elle, et où les Innommables sont les plus puissants. Elle en vient même à aimer ces lieux où elle est sûre que personne ne viendra la déranger. En grandissant, elle prend cependant conscience que sa position n’est pas aussi assurée qu’il lui semblait. Des deux autres grandes prêtresses plus âgées, qui servent les autres dieux du panthéon kargue, une, Kossil, jalouse son pouvoir et considère les Innommables comme des dieux faibles et presque oubliés. L’autre, quoique rigide et taciturne, se montre loyale et juste, mais elle meurt de maladie. Arha comprend qu’elle doit se garder de Kossil, qui pourrait facilement se débarrasser d’elle et mettre fin au culte des Innommables. Alors âgée de seize ans, elle surprend un jour un inconnu dans le Labyrinthe, et elle comprend qu’il s’agit d’un de ces étrangers impies et imposteurs, un mage. Elle parvient à l’enfermer et Kossil lui ordonne de le mettre à mort…

    Je ne vais pas plus loin dans mon résumé pour ne pas spoiler davantage. « Les Tombeaux d’Atuan » est un court roman (à peine 200 p.), centré sur un seul personnage, décrit avec empathie et délicatesse par l’autrice. Comme « Le Sorcier de Terremer », c’est un roman d’apprentissage, mais moins riche en rebondissements et plus introspectif. Il aborde aussi le thème de l’éducation et de la prise d’autonomie de l’individu par rapport à son environnement. C’est aussi le premier roman de l’autrice dont le personnage principal est une femme, une héroïne de fantasy bien éloignée des clichés de l’époque (la princesse en détresse ou la guerrière musclée). Dans sa postface, Le Guin explique qu’elle a voulu explorer le concept du « pouvoir », en distinguant le « pouvoir de » (la force, la connaissance, le talent) et le « pouvoir sur » (la domination, l’autorité, la suprématie). Tenar se voit conférer le « pouvoir sur », mais elle est dépourvue du « pouvoir de ».

    J’ai bien aimé ce roman, qui tranche par rapport à beaucoup d’autres œuvres de fantasy : pas de combats physique, mais des luttes intérieures, un personnage attachant qui évolue et se développe, et avec ce qu’il faut de surprises et de suspens pour faire progresser la narration.

    Elle commençait à apprendre le poids de la liberté. C’est un lourd fardeau et c’est pour l’esprit une charge immense et étrange à assumer. Ce n’est pas simple. Ce n’est pas un cadeau que l’on reçoit, mais un choix que l’on fait, et ce choix peut être difficile. La route monte vers la lumière ; mais le voyageur ainsi chargé risque de ne jamais en atteindre le bout.

    They can keep their heaven. When I die, I’d sooner go to Middle Earth.
    #205230
    Aerolys
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    J’ai lu en début d’année (vers février/mars), Le voyage de Shuna de Hayao Miyazaki.

    Ça m’avait fait repenser à l’adaptation Les contes de Terremer de Gorō Miyazaki. Je ne sais pas s’il s’agit d’une bonne adaptation mais ça m’a donné envie de lire le cycle écrit par Ursula K. Le Guin.

    Je ne sais pas quand je commencerais à les lire car j’ai déjà énormément de choses à lire actuellement mais c’est sur ma liste de livres à lire. ^^

    Toutes les plus belles histoires commencent par une brique sur le pied.

    Si Theon ouvre un bar, c'est le Baratheon.

    Spoiler:
    #207564
    Lapin rouge
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    Je poursuis avec « L’Ultime Rivage », (The Farthest Shore, 1971, traduction Philippe R. Hupp, Françoise Maillet et Patrick Dusoulier). Je n’ai rien à ajouter au résumé de FeyGirl.

    Ce roman est de nouveau une quête initiatique, où un ancien plein de sagesse accompagne le voyage (physique et intérieur) d’un jeune homme avide de connaissances. Bien qu’il y ait de nombreuses péripéties et qu’on explore une bonne partie du monde de Terremer, y compris ses confins, l’atmosphère baigne dans une certaine sérénité, un calme méditatif qui est celui de Ged l’archimage qui ne perd jamais ses nerfs et semble maîtriser toujours la situation. Pourtant, contrairement aux deux premiers romans, on a bien cette fois un « grand antagoniste » qui cherche à remodeler le monde à sa convenance. La civilisation entière de Terremer vacille sur ses bases, et même les dragons en sont perturbés. Mais curieusement, on n’est jamais vraiment inquiets, car Ged reste calme et impassible.

    Comme son titre le laisse à penser, le thème dominant est celui de la mort, à travers la quête d’immortalité de plusieurs personnages. Mais vie et mort sont inextricablement mêlés, et on ne peut rejeter l’une et avoir l’autre. L’immortalité, ce n’est pas la non-mort, c’est le néant.

    Je sais ce que les sorciers croient chercher. Mais je sais aussi qu’ils mourront. Que je mourrai. Que tu mourras. Et je suis infiniment heureux de le savoir. C’est un don précieux : c’est la chance d’être soi-même. Car nous ne possédons vraiment que ce que nous acceptons de perdre… Être soi-même, c’est notre tourment, notre gloire, la marque de notre humanité ; et cela ne dure pas. Le « soi » change, il s’efface comme une vague sur la mer. Voudrais-tu que la mer devienne immobile, que les marées s’arrêtent pour sauver une vague, pour te sauver ? Renoncerais-tu à l’habileté de tes mains, à la passion de ton cœur, à la lumière du lever et du coucher du soleil, pour acheter ton salut – la sécurité permanente ?

    They can keep their heaven. When I die, I’d sooner go to Middle Earth.
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