Watership Down (Richard Adams)

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    DNDM
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    « La Terre tout entière sera ton ennemie,

    Prince-aux-mille-ennemis,

    chaque fois qu’ils t’attraperont, ils te tueront.

    Mais d’abord, ils devront t’attraper… »

    Amazon.fr - Watership Down - Parkins, David, Adams, Richard - Livres

     

    Ca faisait longtemps que je n’avais pas eu un tel coup de cœur pour un bouquin.

    Et c’est une histoire de lapins.

    Mais pas n’importe quelle histoire de lapins. Watership Down (ou Les Garennes de Watership Down) est un livre à la fois épique et poétique, fantastique et naturaliste, bourré d’aventure, de suspense et de magie, et en même temps extrêmement proche de nous. C’est d’ailleurs cet improbable mélange qui fait sa force: ce que Richard Adams nous raconte, c’est une splendide aventure de Fantasy, mais à hauteur de lapins.

    Tous les codes de la fantasy sont là: prophéties, chef, combattants, bardes, quêtes, grand méchant assoiffé de pouvoir, terribles monstres qui rendent les voyages extrêmement dangereux, mythologie riche et passionnante, langage inventé…

    Et tout est, aussi, d’une banalité totale, ou plutôt d’un naturel total, puisque cela se passe dans un espace d’à peine quelques kilomètres, dans une campagne traversée par quelques routes et jalonnée de rares fermes, avec en acteurs principaux des bestioles parmi les plus inoffensives de la création.

    Le bouquin est bourré de moments très prenants (j’ai pas pu le lâcher sur toute la partie 3), mais j’ai trouvé la fin particulièrement réussie.

    Lisez ce livre, il est vraiment génial.

    Et si mon avis ne suffit pas, vous pouvez prendre celui de Lapin Rouge:

    Je voudrais vous parler de mon dernier coup de cœur, Watership Down, de Richard Adams. Je n’avais jamais entendu parler de ce bouquin, jusqu’à ce qu’à l’occasion (hélas) de la mort d’Adams, en décembre 2016, GRRM se fende d’un billet sur Not a Blog, disant que Gardner Dozois et lui tenaient ce bouquin pour un des trois meilleurs romans de fantasy du XXème siècle, les deux autres étant Le Seigneur des Anneaux et L’Épée dans la pierre (The Once and Future King, de T. H. White). Excusez du peu !

    Il est vrai qu’on peut trouver plusieurs points communs entre l’auteur du Seigneur des Anneaux et celui de Watership Down : ils sont tous deux anglais (comme White, d’ailleurs, à croire que la fantasy est plus anglaise qu’américaine !), et tous deux profondément amoureux de la campagne de leur enfance (le Berkshire pour Adams, le Warwickshire pour Tolkien), dont la nostalgie marque leurs œuvres. Tous deux sont marqués, voire traumatisés par la guerre (la Première Guerre mondiale pour JRRT, la seconde pour Adams), et tous deux créent leur premier roman d’abord pour leurs enfants, avant de l’écrire pour une édition publique.

    Mais je ne cacherai pas que Watership Down m’a d’abord dérouté. Non qu’il soit difficile à lire (au contraire, on est immédiatement plongé dans l’action), mais parce qu’il ne correspond pas aux canons de la fantasy habituels : pas de contexte médiéval-fantastique (l’histoire se passe à l’époque de son écriture, donc dans les années 60-70), les personnages principaux sont un groupe d’une dizaine de lapins, fuyant leur garenne natale et cherchant à en fonder une nouvelle au loin. Leurs ennemis ne sont pas de noirs sorciers ni de pâles morts-vivants, mais les renards, les chiens, les chats, l’homme surtout, et même d’autres lapins.

    Et pourtant, passé ce bref instant de désorientation, j’ai plongé avec ferveur dans les aventures épiques d’Hazel, Fyver, Bigwig et leurs compagnons. Ces lapins sont bien sûr anthropomorphisés (ils parlent et raisonnent), mais ils se comportent comme des « vrais », et pourtant, l’univers campagnard banal dans lequel se déroule leur odyssée devient à travers leurs yeux une terre de périls et de merveilles. Le courage, l’amitié, l’ingéniosité et le dévouement sont leurs armes, et ils surmonteront bien des épreuves (mais peut-être pas toutes, pas de spoil !). Il y a des batailles, et mêmes des combats épiques, il y a de l’espionnage, des évasions, des embuscades et des cavalcades ! Il y a aussi des tragédies, des prédictions funestes, et des récits des anciens temps que se racontent les lapins au fond de leur terrier, certains savoureux comme des fabliaux, et d’autres terrifiants comme des romans gothiques. Le roman est épais (500 pages), mais je l’ai dévoré à pleines dents.

    Bon, il y a quand même quelques défauts : principalement l’absence quasi totale de personnages féminins (un autre point commun avec Le Hobbit et Le Seigneur des Anneaux), les quelques hases (lapins de garenne femelles) étant absentes du début du livre et réduites à la figuration à la fin. De manière plus générale, seuls quatre ou cinq des principaux lapins ont vraiment une personnalité détaillée, les autres étant rapidement caractérisés par quelques traits dominants, sans trop de profondeur.

    Mais les plus l’emportent largement. Ce livre est un grand plaisir de lecture, et il faut saluer au passage sa belle réédition chez Monsieur Toussaint Louverture, avec une traduction revue de Pierre Clinquart. Vous trouverez d’ailleurs sur le site de l’éditeur la lecture des premières pages par Guillaume Gallienne (extrait d’une émission de France Inter). Bref, je conseille sans restriction !

    Avant de lire ce bouquin, je croyais que Marvin Rouge était le seul lapin cool de la création, mais Bigwig le vaut bien !

    Ou celui de Crys:

    En ce début d’automne, je me suis attelé au dernier des trois grands livres de fantasy selon Martin que je n’avais pas encore lu, à savoir Watership Down de Richard Adams. Indépendamment de notre gros écrivain préféré, le bouquin (en tant que fan absolu des Légendes de la garde et autres Rougemuraille) me faisait sérieusement de l’œil depuis un long moment, mais je crois que je n’avais retenu que les réserves du post dithyrambique de Lapin Rouge. Allez savoir pourquoi… Toujours est-il que me voilà à craquer sur le bouquin lors d’une virée à Quimper, dans sa version poche parue chez Monsieur Toussaint Louverture dans son bel écrin vert (que je vous conseille de retirer pour lire d’ailleurs si vous faites acquisition de cette version). Et force est de l’avouer… c’est un coup de cœur pour moi également ! <3

    Pour résumer rapidement, suite à une vision de son frère Fyver, Hazel et une troupe de lapin choisissent de quitter leur garenne de Sandleford, appelée à devenir un lotissement pour les hommes. Nous les suivrons au cours de leurs aventure pour fonder leur foyer à Watership Down, notamment dans leurs démêlés avec le général Stachys d’Effrefa. Le livre décrit donc un univers dans notre monde, où les lapins sont capables de parler, de raisonner, mais ont également une mythologie plutôt foisonnante et un langage qui leur est propre. Attendez-vous donc à entendre parler de tracteurs dans la campagne anglaise tout en côtoyant des moments de pure fantasy.

    Le principal défaut du livre, Lapin Rouge l’avait souligné, est que les personnages féminins brillent par leur absence. Autant dans certains livres j’aurais trouvé la chose difficile à pardonner, autant l’absence de hases, une fois la fuite en avant des personnages terminée, est le moteur de l’intrigue pour tous les jeunes célibataires qui auront quitté Sandleford. On sent là-dessus que Richard Adams s’appuie sur une documentation naturaliste de l’époque (je n’ai plus le bouquin en tête) et notamment le départ des jeunes mâles de leurs garennes qui entraînent la prolifération des lapins. Ce faisant, il puise également dans le réservoir mythologique humain, puisqu’il nous rejoue l’enlèvement des Sabines et n’hésite pas à se servir du Héros aux mille visages de Joseph Campbell, carrément cité en ouverture de chapitre. Les pérégrinations de nos héros s’attardent également sur la question de la liberté sacrifiée sur l’autel d’un confort ou d’un système qui n’est pas endémique mais permet de survivre. Et j’avoue que le général Stachys fait désormais partie de mes antagonistes préférés, de par son destin comme sa vision, assez peu « grand méchant parce que je suis méchant ». Bref, vous l’aurez compris, je pourrais disserter sur le bouquin plus avant, mais filez le lire, ce sera plus simple

    Un petit bémol pour ma part, concerne la traduction, mais je ne vois pas bien comment s’en sortir parfaitement avec ce genre d’écrit (notamment sur la langue Lapine, où je pense que le traducteur a juste opté pour des sonorités plus coulantes en VF que leur terme VO). A titre d’exemple, les noms des lapins sont assez simples en VO (Strawberry, Bluebell, Blackberry, Cowslip) et ont des correspondances VF étranges vu que le traducteur a fait le choix d’utiliser les noms scientifiques (Fraga, Campana, Rubus (qui en l’occurence est même le nom scientifique du roncier), Primerol). Certains ne sont pas du tout traduits comme Dandelion ou Bigwig, ce qui rend l’ensemble plutôt hétérogène. D’autres sont juste altérés comme Holly qui devient Holyn ou même Fiver, qui tire son nom de sa place dans la portée, devient Fyver, qui nous évoque plutôt la fièvre et biaise un peu la représentation du lecteur du fait de son côté Cassandre. Enfin, concernant Stachys, il s’appelle Woundwort en VO et Adams joue volontairement sur le mot Wound dans son cas. J’imagine que c’était difficile à rendre avec Épiaire (qui est le nom de la plante en VF), mais bon, au vu du système de fonctionnement d’Effrefa, jouer avec le mot « épier » n’était pas complètement déconnant du coup. Bref, si vous êtes pas des manches en anglais, je pense que la VO vous apportera moins de frustrations de ce côté-là !

    A noter que je me suis enfilé les deux adaptations dans les jours qui ont suivi. Je mets ça sous spoiler pour éviter de prendre trop de place et de spoiler. Mais peut-être vaut-il mieux ouvrir un sujet complet si d’autres gens veulent en causer ?

    Spoiler:

    Celle de 1978 en dessin animé 2D, à la fois onirique et printanière, assez dans l’esprit du bouquin, et si l’intrigue est bien raccourcie (1h30 pour 500 pages), je comprends tous les choix qui ont été faits pour servir au mieux le dessin animé et j’ai eu la sensation que même par de simples évocations visuelles (une tête de blaireau qui poppe dans un décor), on arrivait à couvrir le roman correctement. La production y va même franchement sur la violence et je comprends qu’il y ait des traumas outre-Manche avec ce film, mais la poésie n’est jamais loin comme avec la séquence centrale où Garfunkel vient poser une voix assez éthérée.

    Celle de 2018 par la BBC/Netflix me laisse un goût de trop peu. Ils prennent 3h45 pour couvrir le bouquin mais n’arrivent jamais à rendre la matière foisonnante du texte de Richard Adams du fait du choix de l’animation 3D qui engloutit le budget pour un résultat assez médiocre. Du coup, exit le côté très floral du texte (rendu à l’aquarelle dans la première adaptation) et on recentre tout sur quelques lieux et personnages. Le traitement d’Effrefa emprunte un peu trop à l’imagerie nazie je trouve, et les méchants sont un peu méchants car ils aiment le mal, ce que je trouve assez dommage. De même si les scénaristes ont tenté de moderniser le propos concernant les personnages féminins, ça ne fait que souligner les limites de leurs tentatives (oui montrer Effrefa comme un genre de carcan patriarcal, c’est bien, mais conserver le côté « mâle libérateur » rend la chose un peu vaine). Dans d’autres cas, je ne comprends pas le saccage des personnages (Keehar en tête, mais pourquoi ne plus faire de Dandelion le conteur du groupe au profit de Bluebell alors que Dandelion est quand même conservé à l’écran…) ou de l’intrigue (la destruction de Sandleford est accidentelle dans l’adaptation, intentionnelle dans le scénario où on gaze les lapins dans leur garenne, le propos sur la place de l’homme face à la nature n’est donc pas le même du tout !). Bref, l’esprit du bouquin n’est pas au rendez-vous, mais la musique reste jolie et arrive à emporter quelques émotions, certaines idées de mise en scène sont plutôt bienvenues et le doublage est de très haute qualité (James McAvoy, Nicholas Hoult, Olivia Coleman, Rosamund Pike, John Boyega, Ben Kingsley, Peter Capaldi). Malheureusement ça ne suffit pas !

    Et la formulation qui accompagne le décès des lapins (« My heart has joined the Thousand, for my friend stopped running today » en VO, divisée entre un interlocuteur et un chœur qui complète la sentence) m’a invariablement rappelé les habitudes de la Garde de Nuit, et je ne peux m’empêcher d’y voir une influence d’Adams chez Martin.

    Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
    Présentation & autres pub(lications) : www.lagardedenuit.com/forums/sujets/presentation-dndm/

    #144161
    Crys
    • Terreur des Spectres
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    Mais oui ! Ce bouquin me hante depuis que je l’ai refermé le mois dernier. Je me tâte même à l’acheter en anglais auprès de la librairie parisienne de livres en anglais qui galère à cause des confinements, juste pour replonger dedans. J’écoute la BO des deux adaptations tous les deux jours pour rester dans l’ambiance. Vraiment, ça faisait très longtemps que j’avais pas été aussi à fond !

    #144164
    Lapin rouge
    • Fléau des Autres
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    Merci DNDM, cette œuvre trop méconnue méritait bien son topic !

    They can keep their heaven. When I die, I’d sooner go to Middle Earth.
    #144236
    DNDM
    • Fléau des Autres
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    Je me tâte même à l’acheter en anglais auprès de la librairie parisienne de livres en anglais qui galère à cause des confinements, juste pour replonger dedans

    Lu en anglais, pour ma part, et c’était un vrai plaisir. Y’a pas mal de vocabulaire « des champs » assez précis (noms de plantes ou d’animaux qu’on ne croise pas forcément dans des textes courants, même avec un bon niveau d’anglais), mais du coup j’ai trouvé que ce que je perdais en poésie champêtre faute de connaissance, je le gagnais en imaginaire de fantasy. Quand je tombais sur des descriptions de paysages ou qu’une bestiole au nom inconnu attaquait nos héros, je pouvais m’imaginer absolument ce que je voulais, comme dans un livre de fantasy. Ce que fait déjà le texte en nommant les bestioles ennemies parfois sous leur nom normal parfois sous leur nom en lapin, d’ailleurs ; mais là ça ajoutait encore une couche à ce jeu littéraire et imaginatif. Parce qu’au final, une attaque de griffon ou une attaque de kestrel, c’est tout aussi épique !
    (Bon, au passage, j’en ai profité pour choper quelques mots supplémentaires, quand même.)

    Auteur de "Les mystères du Trône de Fer", tome I, co-auteur du tome 2: https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-les-mots-sont-du-vent/ & https://www.lagardedenuit.com/forums/sujets/les-mysteres-du-trone-de-fer-2/
    Présentation & autres pub(lications) : www.lagardedenuit.com/forums/sujets/presentation-dndm/

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