Le 8 août dernier, George R. R. Martin était à Londres dans le cadre d’une soirée exceptionnelle, organisée par la librairie Waterstones et l’éditeur anglais de GRMM, HarperCollins. L’événement, animé par l’historien et écrivain Dan Jones, a pris la forme d’une longue discussion passionnante revenant sur la carrière du romancier, sur l’écriture de la saga du Trône de Fer et sur son dernier livre : Feu et Sang.
Quelques membres de la Garde de Nuit ont assisté à cette soirée, et ont même pu, après l’événement, rencontrer très brièvement George R. R. Martin qui a gentiment accepté de leur accorder quelques minutes. Un grand merci à ses équipes et aux équipes de Waterstones et HarperCollins pour nous avoir si bien reçus ! Merci également à Pygmalion pour nous avoir mis en contact.
Voici sans plus attendre notre rapport de patrouille.
↑An Evening with George R. R. Martin : Une rencontre passionnante
C’est dans un grand amphithéâtre de bois au Emmanuel Center (dans le quartier londonien de Westminster) qu’a eu lieu l’événement. Deux fauteuils attendaient sur la scène : l’un pour George R. R. Martin et le second pour celui qui allait mener la discussion : Dan Jones, charismatique écrivain, journaliste et présentateur de télévision britannique spécialisé dans l’histoire médiévale (auteur notamment d’un bestseller consacré à la dynastie des Plantagenêts).
George Martin est un habitué de ce genre d’“evening” qui oscille entre l’interview et la performance orale à la façon des talk shows américains. Les membres de la Garde de Nuit ont été marqués par son professionnalisme dans cet exercice, son aisance et la fluidité avec laquelle il ironise et joue avec son public tout en captant son attention.
Pour préparer la rencontre, la librairie Waterstones avait par ailleurs donné la possibilité aux participants à l’événement de transmettre des questions en avance. Nous avons donc envoyé une liste de quelques questions en reprenant notamment ce qui avait été proposé sur le forum (avec quelques questions persos en plus) et nous avons été ravis : deux de ces questions lui ont été posées explicitement, et quelques autres ont servi d’inspiration dans la conversation (merci à tous pour les questions ^_^ !).
L’événement a finalement duré un peu plus d’une heure et beaucoup de sujets ont été abordés, allant de la création de Westeros aux inspirations historiques de sa saga, en passant par sa carrière à Hollywood, la genèse des nouvelles de Dunk et l’Œuf et de la chronique Feu et Sang… La grande majorité de ce que Martin a raconté ce soir-là était déjà connue par le biais des nombreuses autres interviews de l’auteur, mais il y a de nouveaux petits détails intéressants. Et nous n’avons absolument pas boudé notre plaisir d’écouter Martin parler, tant il est à l’aise avec ce genre d’exercice et passionnant !
↑Les infos que nous avons glanées lors de la rencontre
↑La surprise de début de soirée : George R. R. Martin reçoit deux nouveaux prix littéraires
L’événement a débuté par une petite surprise : George R. R. Martin a reçu deux Nielsen Bestseller Awards de platine respectivement pour A Game of Thrones et A Clash of Kings (les deux premières intégrales de la saga principale). Ces prix récompensent les livres qui se sont vendus à plus d’un million d’exemplaires au Royaume-Uni. En janvier 2018, seuls 117 titres (pour 77 auteurs) avaient reçu cette distinction. Avoir deux livres récompensés d’un tel award est donc assez exceptionnel.
George R. R. Martin, toujours heureux de recevoir des prix, a eu une pensée pour les prix qu’il a gagnés et (surtout) perdus au cours de sa longue carrière, notamment lors des Hugo et Nebula Awards. Il nous a rappelé ainsi qu’avec son ami Gardner Dozois, ils ont lancé en 1976 – après avoir perdu aux Hugo Awards dans les deux catégories dans lesquelles il était nominé – la Hugo losers party qui se tient chaque année lors de la WorldCon.
L’auteur a également profité de l’occasion pour revenir sur le parcours fantastique de la saga en librairie : grâce au bouche à oreille, alors que A Game of Thrones avait eu des ventes correctes mais très loin de la liste des bestsellers à sa parution en 1996, il vit les ventes de ses romans s’envoler : A Clash of Kings en 1998 eut un meilleur démarrage que A Game of Thrones, et lui valut pour la première fois de sa carrière les honneurs de la fameuse « New York Times Best Seller list » à sa sortie, le livre restant une semaine dans la liste (en 13ème position), puis A Storm of Swords fit encore mieux, A Feast for Crows lui valut la première place de la New York Times Best Seller list et y resta pendant plusieurs semaines… et ensuite la série fit encore exploser les ventes.
I had no idea that the books would do so well. I hoped that the books would be well received, that they would sell enough for me to continue to write them, and that people would like them. And thankfully they did.
↑La genèse de Westeros
Durant l’été 1991, George R. R. Martin écrivait Avalon, un roman de science-fiction situé dans l’univers des Mille Mondes, lorsque le chapitre où Bran découvre les loups dans la neige lui est venu en tête. Il ne savait alors pas ce qu’il avait en tête : une nouvelle, un roman isolé, une saga… mais une chose était sûre : il fallait qu’il couche cette scène sur le papier.
Quelques mots sonnèrent notamment immédiatement à ses oreilles : « the summer snows » (les neiges d’été). C’est cette locution, saisissante et nette dans son esprit sans qu’il sache d’où l’inspiration lui venait, qui l’emmena vers l’idée d’un monde où les saisons sont déréglées.
Les chapitres suivants sont ensuite venus très vite. Et l’histoire de Westeros s’est construite au fur et à mesure qu’il créait des personnages et des liens entre les personnages. Dans le second chapitre qu’il écrivit, un roi arrive, le roi Robert, mais d’où vient-il ? (Comment est-il monté sur le trône, etc…). A partir d’un certain moment, il s’est dit qu’il aurait besoin d’une carte. Il avait une carte de l’Irlande sous la main, l’a retournée et a eu son premier cadre. Puis petit à petit il a rajouté des éléments à sa carte au Sud, et ainsi, le continent de Westeros est né. Et de même pour les dynasties et éléments d’histoire : les éléments lui sont venus petit à petit au fil de l’écriture.
Ainsi, lorsqu’il crée un personnage, George R. R. Martin ne le crée jamais seul, mais dans un contexte (le milieu où il vit, ses relations avec les personnages préexistants). Il considère qu’il n’écrit pas seulement un livre, mais un ensemble de 12 romans enchevêtrés (à travers chaque personnage Point de Vue), qui, réunis ensembles, forment une histoire.
Durant l’été 1991, George R. R. Martin écrivit finalement une centaine de pages de son histoire. Puis il fut appelé pour travailler sur des scripts de séries télévisées à Hollywood. Il ne revint sur son travail d’écrivain qu’environ trois ans plus tard, mais quand il reprit ses notes, tout était encore frais dans son esprit (contrairement à Avalon dont il se rendit compte qu’il n’avait aucune idée d’où allait cette histoire).
It’s been a simultaneous process. I wrote that first chapter […]. I had some vague sense and then when I went to second chapter, a king is coming, where is he coming from? At some point in that process I said “mmmh I’d better have a map » so, I got out a piece of typing paper and, initially I found a map of Ireland and turned it upside down.
↑Son environnement de travail
La Garde de Nuit avait préparé avec attention ses questions, et la discussion enchaîna assez vite avec l’une d’entre elles :
How is your workspace organized to write ASOIAF? For instance, do you have a cork board like in police investigations where you wrote all the Targaryens and Freys genealogies?
A notre grand regret, nous avons ainsi appris que, non, George n’a pas de tableau de liège où il a tout noté. En revanche, il a imprimé l’intégralité des cartes de The Lands of Ice and Fire (Les cartes du monde connu) et les a affichées dans son bureau. Mais la plupart des informations qu’il a sur la saga est dans sa tête. Il possède quelques fichiers sur son ordinateur récapitulant des informations importantes qu’il a compilées au fil des ans et qu’il consulte parfois, et en cas de doutes, il remercie vivement la fonction « rechercher dans le texte » de son ordinateur qui lui permet de revenir aux informations initiales.
Mais même George R. R. Martin n’est pas à l’abri d’une erreur : il rit en nous expliquant qu’il a des fans hardcore (nos collègues de westeros.org ; et un peu nous aussi pour la version française ^^) qui pointent régulièrement ses erreurs. Il a notamment beaucoup de mal avec les couleurs d’yeux pour certains personnages et s’amuse beaucoup d’avoir involontairement fait changer le sexe d’un cheval au fil des pages (c’est une anecdote qu’il aime à raconter et qui concerne a priori le cheval de Bran qui a changé de sexe).
Fortunately, in the age of computers, we have search and replace function.
↑Sur le Trône de Fer en général
Comme souvent lorsque l’on l’interroge sur son écriture, George R. R. Martin a parlé de la figure de l’écrivain-architecte qu’il oppose à l’écrivain-jardinier. Lui-même se dit à 97% jardinier : il plante les graines de son histoire, il sait quelle espèce il a plantée (ce que donnera l’histoire lorsqu’il aura fini de l’écrire), mais il attend de voir comment évolue le récit : le chemin qu’il prendra pour aboutir à la fin n’est pas connu d’avance. Parfois ça fonctionne, parfois non : il a déjà écrit des chapitres entiers, y est revenu, les a réécrit, pour au final, les abandonner complètement et tout recommencer quand il se rendait compte qu’ils ne fonctionnaient pas.
Il dit d’ailleurs que c’est quelque chose qu’il pense avoir en commun avec Tolkien. Et de même que Tolkien commença son récit du Seigneur des Anneaux avec tous ses personnages réunis, en les séparant au fur et à mesure de leurs aventures en agrandissant progressivement son monde, George R. R. Martin pense faire de même avec ses personnages (à l’exception de Daenerys) : tous présents à Winterfell au commencement, très concentré sur Port-Réal par la suite, mais on va ensuite les suivre séparément, chacun ayant sa propre intrigue, ses propres antagonistes, ses propres problématiques.
Il avoue que son côté « jardinier » l’a desservi. Certains chapitres qui menaient à une impasse et ont été abandonnés sont toujours sur son ordinateur, afin de les avoir sous le coude s’il peut finalement les intégrer plus loin dans le récit. Un jour, il pense peut-être les publier. En particulier, dans ADWD (intégrale 5), en ce qui concerne Tyrion, il avait fait un chapitre où, le long de son périple sur la Rhoyne, Tyrion rencontrait le seigneur au linceul. Il était particulièrement fier de ce chapitre qu’il trouvait excellent. Mais cela ne fonctionnait pas bien avec le reste du récit, alors il a changé la version. Il a tenté d’en faire une séquence où Tyrion rencontrait le seigneur au linceul en rêve, puis en une série de plusieurs rêves. Mais cela ne marchait toujours pas, il a donc abandonné l’idée (en revanche il a conservé l’idée du rêve, Tyrion rêve beaucoup dans ADWD).
À la question de savoir s’il y avait des scènes qu’il aimait particulièrement en rétrospective car elles ont été très amusantes à écrire, il a par ailleurs répondu qu’étonnamment, ce n’est pas du tout celles auxquelles on pourrait s’attendre. Il peut par exemple se réjouir d’avoir parfaitement bien décrit l’herbe dans la prairie. Mais les scènes dont il se souvient le plus sont celles qu’il a eu du mal à écrire. Et les Noces Pourpres en particulier ont été très compliquées pour lui : c’est la toute dernière scène qu’il a rédigée lorsqu’il a écrit ASOS (intégrale 3), la scène lui faisant tellement de peine.
Enfin, s’il devait monter un dragon et porter une épée, lesquels serait-ce ? Il a répondu qu’il aimerait chevaucher le plus puissant des dragons, Balerion. En revanche, il ne voudrait pas d’une épée Targaryen, il préférerait brandir Aube, une épée forgée à partir du cœur d’une météorite, qui pourrait avoir des propriété magiques, qui sait ? ^^ (*Mais enfin George toi tu sais !!! Alors ?? Alors ?? Aube a-t-elle des pouvoirs magiques ??* )
« Who knows what magical properties fallen stars bring to earth ? »
↑Dunk et l’Œuf
Martin est également revenu sur la genèse des aventures de Dunk et l’Œuf. La première nouvelle (Le chevalier errant) a été publiée en 1998 dans l’anthologie Legends, dirigée par Robert Silverberg. À l’époque où Martin a été contacté pour faire partie de l’anthologie, il n’avait sorti que AGOT (l’intégrale 1) dans son univers, et n’avait pas la renommée qu’il a aujourd’hui.
C’était donc un gros projet pour lui, parce qu’il allait figurer aux côtés de grands noms comme Terry Pratchett, Stephen King, Tad Williams, Ursula Le Guin, Robert Jordan (Robert Silverberg étant lui même une éminente personnalité des milieux SF/fantasy de l’époque) et parce qu’il allait recevoir une grosse avance pour écrire sa nouvelle. La thématique de l’anthologie était de faire une nouvelle originale se déroulant dans les univers fantasy de chaque auteur (La Tour Sombre pour Stephen King, les livres du Disque Monde pour Pratchett, le cycle de Terremer pour Le Guin, La Roue du Temps pour Jordan, Les Chroniques de Krondor pour Raymond E. Feist). Martin étant en train d’écrire ACOK (l’intégrale 2), il se demandait sur quel sujet et personnage il allait écrire. Il ne voulait pas parler d’un personnage contemporain de la saga en cours d’écriture, il a donc opté pour un préquel. En temps que grand fan de tournois (il adore lire des textes sur les tournois), il choisit ensuite de raconter un tournoi. Ainsi est né Dunk et l’Œuf.
L’anecdote rigolote, c’est que comme il était en retard pour ACOK, et que Silverberg ne pouvait se permettre un retard pour son anthologie, celui-ci faillit virer Martin et envisagea de le remplacer par un autre auteur qu’il avait déjà contacté. Mais Martin lui dit en substance « Ah non non non. On a un contrat ! Je serai sur cette anthologie ! Je ne suis pas encore en retard ! Tu verras je serai à l’heure ! ». Et Martin rendit effectivement sa nouvelle à temps (et ACOK est sorti l’année suivante), le dernier jour du délai de remise, le 31 décembre. Et il ne fut pas le seul auteur à jouer la montre, puisque cinq autres textes furent rendus ce jour-là. C’est ce qui explique pourquoi il y a 11 auteurs dans cette anthologie, contre les 10 initialement prévus.
Martin pense que cette anthologie a largement contribué à la popularité de sa saga, parce que les ventes d’ACOK ont été meilleures que pour AGOT (et d’ailleurs ça se retrouve au Royaume-Uni : ACOK est le premier livre pour lequel il a eu un Nielsen Awards) : des lecteurs de l’anthologie, l’ayant achetée pour un auteur tel que Pratchett ou King ont lu et aimé sa nouvelle et se sont tournés vers la saga grâce à cela.
Martin a déclaré avoir encore en tête neuf histoires pour Dunk et l’Œuf… Mais il faut qu’il prenne le temps de les écrire… Et avant cela, il a un autre petit livre à terminer… Vous en avez peut-être entendu parler : The Winds of Winter (TWOW pour les intimes). Il semble donc envisager pour la parution le planning suivant : TWOW, puis la quatrième nouvelle de Dunk et l’Œuf, puis ADOS (7ème et dernier livre), puis les nouvelles suivantes de Dunk et l’Œuf et la seconde partie de Feu et Sang (bien sûr, Martin peut changer d’avis, ce planning est vraiment indicatif de ce qu’il espère publier au moment où il parlait. Cela peut changer : on a vu l’exemple avec Feu et Sang, qui n’était pas prévu dans son planning de publication et qui a finalement été publié avant TWOW. Aucune date n’est avancée, pour aucun de ces ouvrages).
↑Wild Cards
« Shakespeare move over : Stan Lee has arrived »
Brièvement, Martin est revenu sur la genèse de la saga Wild Cards : au début des années 80, grand fan de comic books, il jouait avec quelques amis au jeu de rôle Superworlds (centré sur des super héros) de façon assez obsessionnelle (parfois jusqu’à trois fois par semaine) et il réalisa un jour qu’en tant qu’auteurs, ça serait quand même bien qu’ils essayent de gagner de l’argent autour de ces histoires partagées (en ce sens, on sent à quel point GRRM a une conception très américaine du métier d’auteur : contrairement à la vision française de l’auteur artiste bohème, le métier d’auteur pour Martin, c’est son gagne-pain). Et c’est ainsi que naquit la saga Wild Cards, éditée par Martin, qui comprend aujourd’hui 27 tomes, avec en plus de nouveaux tomes annoncés ainsi que deux séries télévisées en cours de développement sur la chaîne américaine Hulu.
↑La carrière de GRRM à Hollywood et la question de l’adaptation
Le quatrième roman de Martin, Armageddon Rag, a été un tel échec commercial que personne ne voulait acheter ses livres. Il s’est donc retrouvé à travailler à Hollywood pendant dix ans. Il a passé cinq ans sur Twilight Zone et La Belle et la Bête, puis cinq ans à faire des pilotes. Il a gravi progressivement les échelons, jusqu’à quasiment devenir showrunner. C’est d’ailleurs, dit-il, l’un des points qui l’a motivé dans le choix de s’impliquer dans la série au début de son développement : il voulait voir ce que ça fait d’être en haut de l’échelle.
Le travail de scénariste était bien payé et intéressant, il appréciait l’émulation qui naissait de travailler avec d’autres auteurs (alors que le métier d’écrivain est assez solitaire) et de voir ses projets prendre vie. Mais Martin raconte tout de même avoir été frustré de voir que certains de ses projets abandonnés, vu l’énergie qu’il avait mise dans l’histoire, et l’investissement émotionnel pour ses personnages. Il n’aimait pas non plus que d’autres personnes interviennent et continuent son travail, en transformant sa version des personnages et des histoires. L’avantage d’être seul face à son écran est qu’il est le dieu de son histoire. Dans l’industrie hollywoodienne, il était un dieu… au milieu d’un panthéon d’autres dieux, et il n’était qu’un petit dieu.
I loved it. But here is the other side of the coin : it’s the other f*** people who all have f*** opinions ! *laughing*
Interrogé plus tard sur les différences entre la saga et la série, Martin s’est dit conscient des nécessités d’adaptations : pour lui, adapter, c’est raconter deux versions d’une même histoire, chacune étant réelle dans son propre canon. Il reprend ainsi l’exemple de Scarlett O’Hara (Autant en emporte le vent) qui a trois enfants dans le roman, et une fille unique dans le film : quelle est la vraie version ? Aucune ! Et de toute façon, il rappelle que dans la « vraie vie », elle n’en a eu aucun, puisqu’elle n’existe pas : ce n’est qu’un personnage de fiction … sans doute un moyen de nous rappeler que tout ça n’est pas bien grave. De fait, dans Game of Thrones, Benioff et Weiss (les deux showrunners) ont fait un travail formidable, dit-il. Certaines choses seront identiques, d’autres non (nous vous renvoyons à ce sujet vers notre article traitant de la question des différences livres/série).
Par contrat, il avait le droit d’écrire un épisode par saison, ce qu’il a fait jusqu’à la saison 4. Chaque épisode, alors que c’était une adaptation de ses propres écrits, lui prenait près d’un mois de travail, le temps de reprendre son travail dans les livres et de le réadapter au canon de la série et aux exigences de son format. Après la saison 4, avec l’effet papillon, les différences entre livres et série étaient devenues très importantes, il ne s’agissait plus simplement d’adapter son travail mais de créer des scènes, et il a décidé de ne pas poursuivre. Un épisode lui aurait demandé un travail de minimum deux mois.
↑Les inspirations historiques
L’interviewer Dan Jones étant un auteur de romans historiques et ayant une formation d’historien, la thématique des inspirations historiques de GRRM a été pas mal abordée lors de la rencontre.
De manière générale, Martin l’a bien précisé : il n’est pas historien et ne cherche pas du tout à l’être, l’histoire académique lui paraît ennuyeuse (Babar a un petit peu pleuré dans son cœur). Lui cherche à raconter une “bonne histoire”, des histoires avec des trahisons, des meurtres, des empoisonnements, etc… Et pour cela, il puise dans les histoires populaires et les romans historiques, qui sont riches de ce genre d’événements. Là où l’histoire en tant que discipline va mettre en doute l’existence de telle ou telle anecdote, l’histoire romancée va mettre en scène ces anecdotes, et c’est ce que Martin cherche à faire : trouver de bons retournements de situations, des éléments marquants, même si, historiquement, ils ne sont pas tout à fait vrais.
Most of the history I read is popular history. If you actually stumble on an academical history, it will probably put you to sleep.
Il a parfois songé à lui-même écrire des romans historiques, mais l’ennui avec les romans historiques, selon lui, c’est qu’on est coincé avec l’histoire telle qu’elle s’est déroulée, on ne peut en diverger. Il préfère la liberté d’inventer ses propres chemins, en s’inspirant d’événements historiques, tout en ayant la latitude de surprendre et d’innover. Par exemple, parlant du mur d’Hadrien : il nous explique avoir adoré s’imaginer, le visitant, tel un soldat terrifié attendant l’ennemi et la fin du monde. Évidemment, un historien vous dira que la fin du monde n’était que des Écossais, mais il s’est servi de cette inspiration pour en faire le Mur, une version du mur d’Hadrien gigantesque, avec un ennemi qui amène cette fois vraiment la fin du monde.
Martin a également évoqué ses lectures sur la guerre des Deux-Roses, l’une des grandes inspirations de la saga, mais il dit s’être aussi beaucoup nourri d’écrits sur la guerre de Cent Ans, sur les croisades, sur les Albigeois, sur l’histoire de l’Écosse (qu’il nous a recommandé, car elle est incroyablement plus sanglante que ce que lui-même peut écrire). Il a notamment cité les écrits de Nigel Tranter, un auteur écossais. Les Noces Pourpres sont d’ailleurs une vision exacerbée du Dîner Noir de 1440 (qu’il considère avoir encore plus été exacerbée dans la série télévisée).
Il s’est également beaucoup renseigné sur les tournois (il adore ça), il y en a quelques uns dans la saga principale, et surtout ils sont au centre de l’intrigue du Chevalier Errant (la première nouvelle des Dunk et l’Œuf).
Parmi les personnages féminins qui l’ont inspiré, il cite Aliénor d’Aquitaine, mais aussi les figures féminines de la renaissance italienne. À cette occasion, il a d’ailleurs cité une anecdote qu’il adore (et il ne faudra pas être surpris s’il la reprend dans la saga, dit-il). L’anecdote est attribuée à plusieurs personnages historiques dont notamment une grande figure féminine de la renaissance italienne (Catherine Sforza a priori) : lors d’un siège, un ennemi détient le fils aîné du couple régnant et menace de le tuer. La dame montre alors ses parties génitales : « je peux en faire d’autres, allez-y. ».
Au rang des inspirations historiques qu’il a indiquées, citons également Henri VIII pour Aegon IV, Saint Louis pour Baelor, et Alexandre le Grand pour Daeron Ier.
Parmi les récits qui l’ont marqué, il cite également le cycle sur les Plantagenêts de Thomas B. Costain, livre de “popular history” qui a fortement influencé l’écriture et le contenu de Fire and Blood (Feu et Sang).
↑Feu et Sang
Un beau jour, les éditeurs de Martin lui ont suggéré l’écriture d’une encyclopédie de la saga illustrée (le futur TWOIAF, sorti en 2014). Martin, grand fan de livres illustrés, travailla donc sur l’histoire de son monde avec l’aide d’Elio Garcia et de Linda Antonsson, administrateurs de westeros.org. Elio et Linda devaient compiler les informations déjà existantes dans la saga, et Martin écrirait ensuite les encarts manquants pour compléter avec des informations inédites. Le livre devait faire 50 000 mots. Mais quand Elio et Linda ont finit de compiler les informations, ils avaient déjà 70 000 mots. Et Martin rajouta 350 000 mots lui-même… Forcément tout n’a pas pu être publié.
La grande majorité des textes de Feu et Sang était donc déjà écrite et vient du trop-plein d’écriture de TWOIAF (et Martin a été assez rapide à les écrire, quelques mois seulement). Martin avait déjà bien avancé pour toute la période allant de la Conquête jusqu’à la régence d’Aegon III quand lui et ses éditeurs réalisèrent que les encarts étaient trop longs pour être intégrés directement à TWOIAF.
Plus tard, lorsque HBO a commencé à parler de faire des prequels, Martin a ressorti ses textes, car ils pouvaient servir comme sources et inspirations. Il a vu avec son éditeur : devrais-je d’abord terminer TWOW (sixième intégrale de la saga principale) ou devrais-je me concentrer sur Feu et Sang ? Feu et Sang était presque fini, ils ont donc choisi de le terminer en priorité et de le sortir en premier, de façon à ce que le texte soit publié avant la série préquelle éventuelle.
Pour publier Feu et Sang, il ne manquait finalement que le règne de Jaehaerys, un long règne de paix sans conflit armé qu’il n’avait pas encore décrit. Lorsque George R. R. Martin a voulu terminer Feu et Sang, il s’est longtemps interrogé sur ce qu’il allait bien pouvoir raconter pendant le règne de Jaehaerys, car c’est le plus long des règnes targaryens et qu’il ne se voyait pas dépeindre quarante ans de paix, de prospérité et d’abondance au risque d’être ennuyeux. Il a donc dû inventer des choses nouvelles pour compléter cette partie, se concentrant sur les intrigues familiales qui contrastaient avec la paix ambiante.
George R. R. Martin dit avoir voulu, avec Feu et Sang, faire comme Thomas B. Costain avec son histoire des Plantagenêts (qu’il recommande chaudement) : raconter une histoire populaire. C’est donc un livre d’histoire fictive, écrit à la manière d’un livre de « popular history« . Et il dit s’être beaucoup amusé à prendre la plume d’archimestre Gyldayn pour raconter son histoire : il ne voulait pas d’une histoire où il disait « Voici ce qui s’est déroulé » mais au contraire, s’est pris au jeu d’être dans la peau d’un historien in-universe qui consulte des sources divergentes et tente d’en déduire le déroulé des événements.
À ce sujet, Martin raconte une anecdote sur le pourquoi de ce choix : il y a des années, pour un roman (qui n’a jamais été terminé ni a fortiori publié), il envisageait de placer son histoire dans le New York des années 1880 au cœur du monde de la presse américaine. Il a en particulier fait des recherches sur « The New York World« , un journal qui fut dirigé par Joseph Pulitzer. En 1890, Pulitzer fit construire le New York World Building qui fut pendant quatre ans le plus haut édifice du monde. Ce bâtiment a été détruit depuis, mais Martin a cherché à connaître son nombre d’étages. Il est arrivé à trois versions : dans chacune des sources, il y avait un nombre d’étages différent (20, 15 ou 16 étages). Et ça l’a marqué : si pour une observation objective concernant un bâtiment relativement récent, il y a trois versions de l’histoire, que dire d’événements qui se sont déroulés du temps de Charlemagne ? C’est avec cette idée en tête qu’il a pensé l’histoire de Westeros, et qu’il a choisi de la raconter à travers les yeux d’un mestre de l’univers.
Son personnage préféré dans Feu et Sang est Champignon. Il dit s’être beaucoup amusé à écrire sous sa plume, qui a toujours la version la plus scandaleuse et sulfureuse de l’histoire.
↑Fire and Blood, une suite ?
Seconde question que nous avions préparée et à laquelle Martin a été invité à répondre en nous citant explicitement :
The second volume of Fire and Blood won’t come out any time soon, but could you give us some elements it might contain?
Martin confirme que rien n’est écrit, mais il a déjà beaucoup d’éléments en tête. Parmi les personnages qu’il a un peu développé : Aegon III (la mort des dragons, les rébellions durant son règne), Daeron qu’il compare à Alexandre le Grand, Baelor qu’il compare à Saint Louis, Aegon IV et ses 9 maîtresses (comparé à Henri VIII et ses 6 femmes), les rébellions Feunoyr, Aerys II et la rébellion de Robert. Il ne prévoit pas de l’écrire avant la fin de la saga principale a priori.
↑Préquels de la série
Martin a évoqué les préquels de la série HBO. Le pilote du projet le plus avancé a fini d’être tourné il y a peu (en Irlande du Nord et en Italie). Le titre officiel de la future série qui devrait en découler n’est pas encore connu, mais désigné par HBO par le nom de code « Bloodmoon » (qui est peut-être un titre de travail, ou bien le titre de l’épisode pilote, ou bien le titre de la série voulu par HBO), mais Martin l’appelle The Long Night (la Longue Nuit) ou The longest Night (la Nuit la plus longue)… et il semble vraiment tenir à ce titre ^^.
Deux autres projets sont également bien avancés, et peut-être qu’un pilote sera tourné pour l’un d’entre eux, voire pour les deux (pour rappel, il y avait cinq projets à l’origine, et l’un a été définitivement abandonné de façon certaine). Il a une fois de plus déclaré qu’un de ces projets est en lien avec la publication de Feu et Sang, mais qu’il ne pouvait pas dire de quoi il s’agissait, au risque de se faire repérer par les agents d’HBO.
↑La rencontre de La Garde de Nuit avec Martin
Nous avons pu rencontrer George R. R. Martin en personne (hiiiiiiiii !) juste après la conférence. Il était prévu que ce soit rapide, Martin ayant déjà un dîner de prévu. Mais il a quand même pris le temps de venir nous voir. Ses équipes, en collaboration avec les organisateurs britanniques de l’événement HarperCollins et Waterstones avaient adorablement préparé une petite table pour nous un peu à l’écart, à laquelle Martin est venu s’asseoir (hiiiiiiiiiiiiiiiiiiii), après nous avoir salué d’un “So you are the French delegation”. On a échangé le pain et le sel (le coca et l’eau, c’pareil). On va pas vous mentir : on était un peu (très) impressionnés, on a beaucoup bégayé… mais qu’est-ce-qu’on était heureux ! Une quinzaine de minutes en tête à tête avec Martin, c’était déjà inattendu !
Nous lui avons tout d’abord offert 7 cadeaux : une clé USB contenant les vœux de la Garde de Nuit que nous avions enregistrés à son intention lors de la célébration des 10 ans de l’association (pour la petite histoire : la dernière fois que l’on a vu Martin, à Dijon, il nous a demandé de réciter nos vœux puisque on est la Garde de Nuit… ce fut le grand blanc… D’où cette vidéo à son intention… mais il ne se souvenait plus de cela a priori ^^’. Ouf. De Dijon il a surtout retenu le fait qu’il avait dédicacé pendant 4-5h ^^), l’excellent essai de Thierry Soulard (que la Garde de Nuit vous recommande) Les mots sont du vent, afin que Martin ait dans sa bibliothèque le premier livre français consacré exclusivement à l’analyse de son écriture, du champagne et des macarons (French represent ^^), deux livres d’histoire (on espère qu’il ne les classera pas dans la catégorie académique ennuyeux ^^) et des soldats de plomb, parce qu’il est fan. Nymphadora lui a fait une belle déclaration sur l’importance que lui et ses œuvres avaient eu sur notre vie à tous (la création de la communauté, les liens entre les membres, etc..).
Il nous a ensuite posé une question :
“I have a question for you guys : Did they fix the « Loup-garou » issue in the French edition?!”
… Oups xD. Voici un débat qui aura fait coulé beaucoup d’encre sur les forums francophones et l’auteur a donc tranché : il trouve que “loup-garou”, ça ne va pas du tout. ^^ Il nous a confié avoir pris pour inspiration du “direwolf” un loup géant dont l’espèce a réellement existé… rien à voir avec les « werewolves » (loups-garous) donc. Malheureusement, l’espèce originelle n’a pas de nom français (on parle de Canis Dirus, littéralement « loup sinistre ») et nous nous sommes retrouvés en France avec une traduction que l’on peut qualifier poliment de discutable… Nous l’avons tout de même rassuré en l’assurant que si la traduction n’a pas été corrigée dans le texte français, elle est toutefois évitée par moults circonvolutions dans les tomes les plus récents. Le traducteur actuel de la saga, Patrick Marcel, qui a pris le relais de la traduction après que Jean Sola a traduit les premiers tomes, fait en sorte d’éviter le terme “loup-garou”, en parlant simplement de “loup”.
George R.R. Martin nous a ensuite consolés en nous expliquant qu’on n’était pas les seuls à avoir de drôles de traductions : dans le premier tome de sa saga en langue italienne, l’andouiller qui tue la mère des loups a été traduit en une corne de licorne… apparemment un andouiller ne sonnait pas assez fantasy pour l’Italie ^^.
On l’a par la suite interrogé sur d’éventuelles indications qu’il pourrait donner aux traducteurs de sa saga, fort de ces mésaventures. Mais il ne donne aucune indication aux traducteurs : cela lui prendrait trop de temps et comme il ne maîtrise que l’anglais, il n’estime pas être à même de donner des indications pertinentes sur des questions de traductions. Même pour son univers, il n’a pas inventé de langue, mais juste quelques mots de haut-valyrien et de dothraki. Ces langues ont ensuite été créés pour la série et désormais, s’il veut mettre des mots de ces langues dans ses livres, il appelle son linguiste.
Il nous a également raconté une anecdote concernant la traduction en français d’un autre de ses ouvrages : une fan francophone, traductrice de profession et grande amatrice de ses œuvres, lui avait dit qu’un de ses livres – un de ses premiers recueils de nouvelles de SF – était mal traduit en français. Du coup, il a fait en sorte que ce soit elle qui traduise le suivant. Finalement, lorsque son ouvrage suivant est sorti et que cette personne l’a traduit, des gens se sont à nouveau plaints de la traduction… Bref, la traduction, ce problème sans fin … Lui préfère ne pas y toucher.
Babar des Bois a ensuite posé une question sur ses lectures en histoire : il a lu des auteurs de l’époque médiévale (il a confirmé qu’il avait lu Jean Froissart, il y a des années de cela), mais est ce qu’il a lu des auteurs antiques ? Il a répondu qu’il avait lu Suétone (il en a probablement lu d’autres, mais il a répondu sur Suétone), et qu’il adorait, parce que ses histoires était pleine d’empoisonnements, d’incestes, de meurtres. Le personnage de Champignon est d’ailleurs en partie inspiré par Suétone. Il est l’une des sources qui a servi pour la série I, Claudius, que Martin aime beaucoup. À ses yeux en tous cas, Suétone n’est pas ennuyeux comme de l’histoire académique, nous a-t-il dit ^^. Et enchaînant sur ses lectures historiques, il nous a ensuite ré-affirmé son amour pour la saga des Rois Maudits (il ne pouvait pas ne pas mentionner Druon à des francophones ^^).
On avait encore de nombreuses questions à poser, mais il nous a ensuite été enlevé pour aller dîner :’( Au total, nous avons vécu un petit quart d’heure (mais pas entre deux portes, vraiment posé) très sympathique. Il est peu probable que Martin se souviendra vraiment de nous (ou même du nom de La Garde de Nuit, il est tellement tellement sollicité à droite à gauche, c’est impressionnant), mais il sait qu’il y a une communauté francophone autour de ses livres. Il nous a signé un livre Fire and Blood (que vous pourrez voir sur le stand de l’association si vous venez nous voir sur les quelques salons auxquels on participe), puis on a pris quelques photos avec nous et il nous a remercié d’être venu. On retiendra à quel point c’était vraiment adorable de sa part d’avoir accepté de prendre ce temps, parce que c’est probablement moins pour lui qu’il l’a fait (c’est pas comme s’il avait des millions de fans qui lui écrivent régulièrement ^^) que pour nous. Alors merci George, on te kiffe !
Et maintenant… rendez-vous en Irlande ! De nouveaux Français avec leur accent à couper au couteau et leurs yeux pleins de paillettes t’attendent à Dublin 😉 (et à Belfast).
On vous laisse sur une petite galerie de photos (cliquez pour agrandir) :
lilou black
Quel chouette compte-rendu ! Il en avait, des choses à dire, Monsieur George… Son propos sur le travail créatif est passionnant (et Bran est un plot-bunny, hu hu hu !), et ce qu’il dit des inspirations historiques pourrait donner des heures de discussions ; je serais plus nuancée que lui sur l’histoire académique, j’avoue, mais ça doit vraiment dépendre des points de vue et de l’usage qu’on en a. Les anecdotes sur les traductions sont assez cocasse, non mais cette corne de licorne, what the phoque ?
Sinon, Champignon détient le pouvoir. J’ai dit !
Freuxpensant
La vérité est dans les champignons….
Merci aux Corbacs de la GdN pour ce compte-rendu !
Aspics des sables
Un article qui, de par sa pertinence, fait honneur à GRRM.
Son planning me plait bien, étant autant en attente de la suite d’ASOIAF que de celle des aventures de Dunk&Egg. Il va falloir cependant être encore un peu patient, aucune date n’ayant été communiquée.
On perçoit votre réel plaisir à avoir pu participer à cette soirée exceptionnelle (et rencontrer GRRM) à travers, entre autres, la manière de nous la faire partager (que ce soit à travers les informations retranscrites que les photos). Un grand merci à vous !
Aurore
Contente que la GdN ait pu rencontrer le Maître… moi je crois que je ne saurais pas quoi lui dire (et en anglais en plus).
Je suis contente de constater que si je pense toujours à saint Louis en lisant la vie de Baelor le Bienheureux, c’est parce qu’il y a la meilleure des raisons !
Emmalaure
J’étais complètement passée à côté de cet article ! Merci pour ce compte-rendu passionnant !