Comme annoncé hier, voici aujourd’hui un résumé de notre participation à une table ronde sur les Trônes de Fer, organisée et animée par le Centre de l’Imaginaire Arthurien.
Cette scène réunissait Didier Graffet, illustrateur du calendrier ASOIAF 2017, Yvon Boëlle, photographe des lieux de tournage de GOT en Irlande, et Lard-Jon Omble de la Garde de Nuit.
Yvon Boëlle, photographe breton, a précisé avoir été invité par le journal BRETAGNE magazine à se rendre sur les divers lieux de tournage de Game of Thrones en Irlande du Nord. Ce qui l’étonna était les foules devenues impressionnantes de visiteurs de ces lieux de tournage, désormais proposés par des agences spécialisées. Et ce, bien que, parfois, certains lieux soient vraiment minuscules ou perdus, mais ceux-ci, visiblement, en vivent dorénavant. Il était aussi amusé de voir les gens sortir des tablettes numériques pour afficher certaines scènes de la série GOT en vidéo et trouver précisément l’emplacement de la scène.
Il a aussi narré une anecdote sur un lieu spécifique, le chemin bordé de grands arbres, où se déroulait la scène de fin du premier épisode de la saison 2, avec Arya quittant Port-Réal avec les recrues de Yoren, le Garde de Nuit. Il s’était ainsi levé très tôt pour profiter de la lumière afin de photographier dans de bonnes conditions mais trouva pourtant déjà dehors quatre autres photographes avec leurs appareils respectifs sur trépied, attendant la même chose que lui.
Pour sa part, Didier Graffet a évoqué la manière dont il a été contacté pour créer ce calendrier 2017. L’illustration ci-dessous était présentée à une convention aux États-Unis par son agent américain. Le style fantasy a plu à l’agent de George Martin, et ce dernier fut à son tour informé puis emballé par le travail de Didier Graffet, au point de confier au Français la création du prochain calendrier ASOIAF.
Pour la petite histoire, George Martin a d’ailleurs acquis depuis l’original de cette illustration qui « trône » désormais chez lui à Santa Fe. A noter aussi que c’est la troisième fois que George Martin choisit un illustrateur français, après Marc Simonetti et Magali Villeneuve.
Concernant l’élaboration du calendrier, Didier Graffet indique avoir repris sa lecture du Trône de Fer, datant originellement des premiers tomes, afin d’élaborer les illustrations. Et comme vous pouvez le voir sur l’image ci-dessous, il a pris de très nombreuses notes, nécessaires selon lui pour placer géographiquement les personnages ainsi que leur contexte
Didier Graffet précise aussi n’avoir pas toujours eu la liberté de conception, George Martin et/ou ses assistants n’hésitant pas à faire corriger impérativement nombre de points sur les illustrations. Et à rappeler fortement de ne JAMAIS s’inspirer de près ou de loin de la série télévisée, mais uniquement des livres. Et seulement de ce qui se passe dans les livres : ainsi, Didier Graffet avait souhaité représenter la construction du Mur par les géants sous la direction de Bran le Bâtisseur, mais ce fut refusé, car une telle scène n’existe pas vraiment dans les livres.
D’une manière générale, Didier Graffet n’est pas friand de cette volonté américaine de contrôler le moindre détail d’une œuvre : quand il peint quelque chose, l’impression d’ensemble est plus importante que les détails. À trop vouloir changer chaque détail pour qu’il soit parfait, on peut perdre cette impression d’ensemble diffusée par la peinture.
Autre exemple, concernant Mélisandre, qui fut dessinée très stricte dans les premiers croquis, mais Martin a insisté sur le fait qu’elle était pulpeuse et que ça devait se voir, notamment dans la poitrine.
Il avait également prévu de nombreuses images dont la majorité n’a pas été retenue car déjà traitées par d’autres artistes. Or, l’éditeur ne veut que du neuf ; et comme Graffet ne regarde pas ce qui se fait à côté quand il commence un travail, pour subir le moins d’influence possible… C’est ainsi qu’il s’est retrouvé à faire la même image (en crayonné) que Simonetti sur Daenerys face à Drogon dans l’arène de Meereen.
Cela dit, à l’opposé, George Martin savait aussi exprimer avec emphase sa grande satisfaction les cas échéants.
Concernant la double page centrale du calendrier évoquant Châteaunoir au pied du Mur, Didier pensait représenter le fort principal de la Garde de Nuit avec quelques bâtiments disséminés. Mais là, encore, les corrections arrivèrent des États-Unis avec moult détails (et moult retards à cause du décalage horaire très conséquent et via deux intermédiaires, ce qui ne facilita rien aux échanges) sur le nombre de bâtiments, leurs fonctions et leurs emplacements, comme vous pouvez l’apercevoir sur l’image ci-dessous.
La mise en page des illustrations principales fut aussi discutée, à cause de la forme des planches du calendrier. Didier Graffet n’adhère guère au dessin en carré. Pour lui, on ne sait alors pas vraiment dans quel sens va le dessin. En fantasy, il préfère un rectangle vertical pour donner l’impression que ça s’élève, ou horizontal pour les scènes plus larges.
Didier Graffet réussit à trouver un compromis satisfaisant, à savoir des pages rectangulaires mais encadrées de montants (et donc un visuel complet de forme carrée) dans lesquels il illustrait autre chose en lien avec l’image principale. Et ce, permettant une autre lecture avec ces informations additionnelles, comme, par exemple, Daenerys et ses dragons sur l’illustration principale mais encadrés, dans les montants, par des harpies, évoquant sa situation à Meereen.
Pour conclure, Didier Graffet revient sur le fait que les conditions de création n’étaient pas toujours idéales et que la charge de travail était énorme (9 mois pour 13 illustrations), mais qu’il ne concevait pas de passer à côté d’une telle opportunité.