Musique !
Et que chacun se mette à chanter…
Et que chacun se laisse emporter…
Aujourd’hui, en ce jour de fête de la musique, la Garde de Nuit vous propose des recommandations littéraires en lien avec la musique. C’est l’occasion de rappeler que George R.R. Martin est lui-même un grand amateur de rock, qui a bercé sa jeunesse (comme il le rappelle encore dans un tout récent billet de son blog). On peut le constater notamment en lisant son roman Armageddon Rag. Et la musique est également un élément important dans la série GoT (nous vous renvoyons à ce sujet à l’article de Crys).
Mais, sans plus attendre, place à nos recommandations ! De quoi vous en mettre plein les oreilles, et plein les yeux !
↑Chronique du tueur de roi, de Patrick Rothfuss
Avec Le Nom du vent et La Peur du sage (les deux tomes composant la saga, le deuxième étant lui-même divisé en deux volumes dans la VF, et un troisième tome étant annoncé), Rothfuss signe une déclaration d’amour à la musique (d’où la présence de cette recommandation ce mois-ci^^)… mais pas que, loin de là ^^ Il signe surtout la saga de fantasy qui m’a le plus accrochée depuis le Trône de Fer !
Dans cette saga, nous suivons le parcours de Kvothe, personnage de légende dans un monde qui semble en proie à un présent tumultueux. Le livre relate en fait deux histoires : tout d’abord le « présent », celui de Kote, un aubergiste au sombre passé. Mais c’est surtout la véritable histoire de Kvothe, contée par l’aubergiste, qui s’avère être le fameux héros.
Kvothe a grandi au milieu d’une troupe d’Edema Ruh, des saltimbanques errants. Il adore la musique et possède un talent certain pour le luth. S’instruisant au gré de ses rencontres, il commence à s’intéresser aux sciences et au sympathisme, une forme de magie qui permet à son utilisateur de créer des liens entre deux objets et d’en altérer la nature. Dans ce monde, connaître le vrai nom des éléments permet en outre de les contrôler. De fait, Kvothe cherchera longtemps le nom du vent. Un jour, sa troupe est attaquée par des Chandrians, des démons légendaires qui le laissent seul survivant du massacre. Traumatisé, il cherchera ensuite un moyen de vaincre les Chandrians et rejoindra pour cela l’Université afin de s’instruire en magie, et vivra des aventures passionnantes.
Partant d’un postulat classique (un enfant brillant seul survivant d’un massacre), Rothfuss crée une musique d’une poésie fascinante qui vibre en nous. Avec des personnages forts, un monde prenant, des rebondissements qui accrochent, la Chronique du tueur de roi est déjà considérée comme un classique de la fantasy. Un roman coup de cœur, riche et touchant, qui revient régulièrement dans les listes de livres de fantasy incontournables… à raison !
En revanche, soulignons tout de même que Rothfuss est un écrivain qui n’écrit pas plus vite que notre cher George R.R. Martin : le troisième et dernier tome de la saga est attendu depuis 2011… Mais le Trône de Fer nous a enseigné la patience, non ?!
Nymphadora
↑Les Maîtres sonneurs, de George Sand
Bien avant les Aspics des Sables, il y avait une certaine George Sand – autrice française du 19ème siècle – qui a écrit un paquet de livres, dont quelques-uns tournent autour de la musique. Aujourd’hui, je ne parlerai pas du plus gros (Consuelo et sa suite, La Comtesse de Rudolstadt), mais d’un roman relativement court qui explore à sa manière la musique populaire dans les campagnes du centre de la France, dans la période de l’Ancien Régime. La parole est donnée à un vieux paysan qui raconte ses souvenirs de jeunesse, ses amours, ses amitiés et ses aventures entre deux « pays » voisins, celui des plaines du Berry et celui des forêts du Bourbonnais. Si la langue de Sand garde constamment sa touche très élégante, elle n’hésite pas à truffer ses dialogues de mots populaires et typiques de ces régions, et le résultat est magnifique. Le phrasé est simple mais la langue riche et savoureuse, et elle exploite avec bonheur toutes les ressources du français. On y prend une vraie bouffée d’air frais : lire du George Sand fait un bien fou.
Les Maîtres sonneurs parle donc de la confrérie des « museux » – joueurs de cornemuse – qui vont de village en village faire danser les gens. Il y a des rivalités, des maîtres et des apprentis jaloux de leurs privilèges, des territoires réservés, des musiciens plus inspirés et doués que d’autres mais qui peinent à entrer dans le moule traditionnel… Ce roman est également l’occasion de lorgner du côté de la mythologie populaire, celle qui est restée orale et n’a quasiment jamais eu en France les honneurs de la littérature ni des études « nobles » : on croise donc des chasses infernales, des arbres à sorcières et démons, des vrais-faux fantômes, on y joue à se faire peur, et les lecteurs du Trône de Fer devraient y retrouver des choses qu’ils connaissent déjà bien. Non pas que George R.R. Martin ait lu George Sand, mais plutôt que tous les deux ont puisé au même fond littéraire. Et puis, les personnages y sont finement développés, certains garderont leur mystère pour toujours, il n’y a pas de monde à sauver, ni de bons ni de méchants, la comédie flirte avec la tragédie, et le point de vue adopté est celui d’un narrateur unique non-omniscient.
Emmalaure
↑Perkeros – Les Notes fantômes, de JP Ahonen & KP Alare
Aux choses qui se lisent, ajoutons des choses qui se regardent, faute de choses à entendre, puisque la littérature, à moins d’une lecture à voix haute, se fait rarement un chemin jusqu’à nos oreilles.
Il s’agira donc d’une bande dessinée en guise de recommandation, qui sur le fond, correspond tout à fait à ce que l’on envisage lors de la fête de la musique : un groupe de jeunes (ou de moins jeunes) gens cherchent à se produire sur scène, emmenés par leur leader, Alex. En guise de rêve, il y a la notoriété, mais pour l’heure, la réalité les rattrape : le leader est un mauvais chanteur et il leur faudra affronter quelques couacs pour parvenir à participer à un tremplin, aussi bien sur le plan personnel que musical. Cette histoire, tout le monde l’a déjà un peu vécue avec un groupe de lycée ou de fac, mais l’originalité des auteurs est ici de mâtiner le tout d’un peu de poudre magique.
Nous sommes dans un univers imaginé par des Finlandais, Ahonen et Alare, lesquels n’hésitent pas dès le départ à nous présenter des éléments fantastiques, comme par exemple un ours derrière les fûts en guise de batteur. Quant à la musique à l’honneur, puisque nous sommes dans les territoires scandinaves, elle sera « metal », encore que si l’on croise les corpse paint de quelques blackmétalleux, c’est davantage le « prog » (ou « metal progressif ») qui est mis en avant, à la manière de groupes comme Opeth ou Porcupine Tree entre autres (même si les mentions en restent anecdotiques). Quelques clivages avec des hipsters qui jouent de la pop sont à prévoir, mais pas de restrictions de genre, la bande dessinée peut se lire comme une aventure unique dans un monde onirique, où réalité et fantastique se mêlent autour des personnages éminemment humains et touchants.
À noter que la bande dessinée a été développée et publiée en finnois, mais que la publication en français n’est pas une simple traduction, puisqu’Ahonnen a travaillé avec les éditions Casterman à l’élaboration de la VF pour préserver le rendu de la VO. Un second tome est à l’étude, mais pour l’heure l’histoire est indépendante, autant dire qu’il n’y a aucune raison de ne pas s’y plonger et de se frotter aux problèmes de la créativité artistique et des codes sociaux dont le musicien doit s’émanciper pour produire une œuvre tout en restant intégré ; bref, tout un programme qui parlera sans doute à tous ceux qui ont un jour rêvé de dépasser le stade du « Je joue de la guitare sèche au coin du feu sur la plage » ou leurs amis.
Crys
↑Accros du roc, de Terry Pratchett
On ne présente plus Terry Pratchett et ses Annales du Disque-monde, cycle emblématique de la fantasy humoristique. Seizième volume du cycle, Accros du roc nous présente Kreskenn, un jeune barde quittant sa ville natale pour se rendre à Ankh-Morpok, la capitale du Disque-monde, pour entrer dans la guilde des Musiciens. Malheureusement, ne pouvant en payer les droits d’entrée, il ne peut y accéder. Son instrument de musique (une harpe) se brisant, il achète une guitare des plus particulières, qui semble résonner de la musique des Origines…
Dès lors, il formera un groupe avec d’autres recalés pour montrer aux uns et aux autres qu’ils savent faire de la bonne musique. Sans oublier évidemment que la Mort (et sa « famille ») sont aussi au menu de ce tome !
Dire que ce roman est un cri d’amour à la musique (et au rock en particulier) serait insuffisant. Tout y est ! La patte d’humour anglais de Pratchett, les clins d’œils appuyés aux groupes de rock, l’ambiance complètement déjantée de certains concerts, le manager véreux (venant de vous-savez-qui, c’est pas étonnant ^^), et j’en passe, ce roman est une vraie pépite. De plus, il est à noter que la traduction est impeccable, magnifiant le texte originel sans le trahir, ce qui est une véritable prouesse tant certains jeux de mots de Pratchett sont intraduisibles.
Bref, vous aimez le rock (#metal) ? Vous aimez l’humour (anglais pince sans rire) ? Et vous aimez la Mort (parce que la Mort, Il est trop cool! ET IL PARLE COMME ÇA) ? Jetez-vous sur Accros du roc !
Geoffray
↑Conclusion
Nous espérons vous avoir fait découvrir de chouettes lectures ! N’hésitez pas à réagir, ou à ajouter vos propres idées dans les commentaires. Et si vous n’avez pas trouvé votre bonheur ici, vous pouvez toujours retrouver les conseils des mois précédents dans l’annuaire de toutes les recommandations publiées sur le blog de la Garde de Nuit.
DNDM
Haha je me rends compte que je n’ai aucun souvenir d’Accroc du Roc, en fait. A relire.
Et bravo Emmalaure, j’ai envie de lire Les Maîtres Sonneurs maintenant.