Souvenez-vous : en octobre dernier, nous vous proposions notre tout premier article de recommandations dans le cadre du mois de l’imaginaire. Cette année, rebelote ! Mais nous avons décidé de rajouter une contrainte : évidemment, nous parlons de littérature de l’imaginaire, mais nous nous cantonnerons cette fois-ci à des récits écrits en langue française publiés récemment (dans les cinq dernières années). En espérant que les recommandations de nos chroniqueurs vous plairont. Et n’oubliez pas : achetez des livres et soutenez les auteurs !
↑Bertram le baladin, Camille Leboulanger (2017)
Dans un monde où l’on a oublié la recette du papier, les baladins sont des membres essentiels de la société : ils parcourent le pays afin de répandre et obtenir les nouvelles. Mais Bertram, membre de la guilde des musiciens toute puissante, a le malheur de se faire voler son luth. Le lecteur va le suivre dans des aventures qui le mèneront par monts et par vaux pour retrouver son instrument. Accompagné par l’intrigante Sans-Nom, il fera tout pour retrouver sa musique.
Avec un roman rythmé et très agréable à lire, l’auteur nous fait découvrir ses personnages tout en nous plongeant dans son univers de manière très fluide : si l’action tourne autour des personnages, les descriptions du monde de Bertram font mouche en donnant envie d’en savoir plus. Livre léger et frais, on est loin des sagas de fantasy à rebondissements auxquelles on est parfois habitués (surtout quand on se retrouve entre amateurs du Trône de Fer ^^) : ici, on est face à un récit court et joyeux, sans grandes conséquences mais dynamique et divertissant. Sans être révolutionnaire, le roman nous emporte dans une petite musique joyeuse. De temps en temps, ça fait du bien !
Nymphadora
↑Olangar : Bans et Barricades, Clément Bouhelier (2018)
Dix-sept ans ont passé depuis la bataille d’Oqananga, où la coalition entre les Elfes et les Hommes a repoussé les Orcs par-delà les frontières.
À l’approche des élections, Olangar est une capitale sous tension, véritable poudrière où seule manque l’étincelle. Tandis que les trois candidats noircissent les journaux de leurs promesses, les accidents se multiplient sur les chantiers navals ; les salaires se font attendre et la Confrérie des Nains menace d’engager un mouvement de grève d’une ampleur jamais vue. À leur tête, Baldek Istömin ira jusqu’au bout. Au même moment, Evyna d’Enguerrand, fille d’un ancien seigneur de guerre, débarque en ville pour chercher la vérité sur la mort de son frère. Pour l’aider, elle fait sortir de prison Torgend Aersellson, un Elfe banni par les siens et vieil ami de son père. Ensemble, ils se lancent dans une enquête acharnée, qui les mènera des bas-fonds de la cité jusqu’aux couloirs de la Chancellerie et ses arcanes politiques.
On continue avec un autre roman des éditions Critic. Autant le dire tout de suite : Olangar est un diptyque d’environ 950 pages qu’il serait dommage d’abandonner au milieu. D’autant qu’on est vraiment en présence d’un récit tronqué dont les deux parties sont parues assez rapidement. Le second volume évite donc les rappels des épisodes précédents, comptant sur la mémoire du lecteur pour avancer. Sur l’idée générale, Clément Bouhelier avoue que son idée de départ est un monde à la Tolkien qui aurait évolué technologiquement. Pour ma part, j’ai trouvé que sa fantasy oscillait plus entre The Witcher (sans les monstres mais avec le racisme) et Warcraft (des Nains avec des fusils et des Orcs aux défenses qui dépassent). Pour le reste, si vous rêviez de quelque chose qui associe les précédentes références avec les luttes ouvrières de Zola, les barricades des Misérables et les westerns de Sergio Leone, le livre est fait pour vous ! L’ensemble est plutôt noir, et à ce titre, si le dénouement peut paraître un poil prévisible, la conclusion est très bien maîtrisée et donne un petit goût de « Reviens-y ! ». Quant aux personnages, le duo de femmes qui se forme et évolue sur le tome 2 est une belle réussite. Bref, Clément Bouhelier signe une lecture intelligente et bien ficelée, durant laquelle on ne peut s’empêcher de penser aux récentes élections présidentielles occidentales. Une sensation plutôt rare en Fantasy, donc !
Crys
↑Spire, Laurent Genefort (2017)
Spire est une trilogie de science-fiction racontant la création et l’expansion d’une compagnie spatiale de fret au sein d’une humanité en pleine expansion à travers des portails laissés par les Vangk, des aliens dont on ignore tout. Alors que les grandes compagnies se concentrent sur les riches mondes centraux les plus rentables, quelques fortes personnalités des mondes des Confins décident de monter une entreprise qui reliera les tas de cailloux les plus excentrés, plus dangereux, exotiques et bien davantage dans le besoin que les planètes colonisées de longue date. Les défis économiques et éthiques seront nombreux, et les capitaines marchands courageux et les dirigeants de la Spire devront faire face à la concurrence impitoyable des autres compagnies, à l’appât du gain du genre humain et aux nombreux dangers exotiques de l’espace.
Si le thème est le commerce, on en parle finalement assez peu. Spire est avant tout une fresque dépeignant un moment de l’histoire humaine dans l’univers que Laurent Genefort est en train de construire à travers ses nombreux romans. Le parallèle est assez aisé avec la conquête de l’ouest américain et la lutte sans foi ni loi entre les grandes compagnies ferroviaires. Mais la Spire, et donc le roman, vit grâce à sa brochette de personnages attachants et à un univers SF bien construit et réaliste sans être trop pointu.
La trilogie est donc une bonne porte d’entrée dans l’univers de Laurent Genefort, dont je ne peux que vous conseiller le cycle d’Omale. Ce dernier se passe dans le même univers, plus tard, quand soudainement les portes de Vangk ont mené les vaisseaux humains au cœur d’un dôme vaste comme plusieurs centaines de Terre, en compagnie de 2 autres espèces extra-terrestres embarquées on ne sait trop pourquoi dans la même galère. Et contrairement à Spire, trois romans distincts un peu brefs bien que divertissants, Omale est une fresque monumentale passionnante.
Pandémie
↑La Porte des Abysses, Alexis Flamand (2017)
La Porte des Abysses, premier tome du Cycle d’Alamänder, nous narre l’histoire de Jon Alamänder, mage-détective de son état. Suite à certaines péripéties (que je ne divulgâcherai pas) il est chargé d’une enquête assez particulière…
Étrange mélange de steampunk et de fantasy, le cycle est une vraie curiosité. J’avoue qu’au départ, je n’étais pas trop vendu à l’étrange mélange et à l’humour un peu trop présent. Et puis, le dosage se fait bien et une fois entré dans le livre, impossible de le lâcher avant la fin. L’humour, bien que toujours présent, est bien équilibré. Les personnages font preuve de dérision envers eux-mêmes, mais aussi envers leur « monde » et c’est vraiment funky ! J’ai même pensé à du Pratchett en français par moments et même si (j’espère que l’auteur me pardonnera) ce n’est pas au même niveau (du moins pas encore), c’est quand même vraiment appréciable !
L’univers présenté, bien qu’étrange, est crédible, il n’y a que quelques personnages (ce qui est sympa pour changer ^^), l’action se déroule sur peu de temps et l’intrigue s’enchaîne rapidement. Il y a des vraies trouvailles complètement dingues dans ce roman, que ce soit au niveau de l’univers ou de la magie (par exemple le « blé pensant ») et l’auteur n’hésite pas non plus à casser le 4e mur pour s’adresser aux lecteurs (et personnellement, j’aime beaucoup). Si j’avais un petit reproche à faire, c’est que la fin de ce premier tome est assez attendue (pour qui a de la bouteille). Ce n’est pas gênant en soi, mais il fallait bien que je trouve un défaut :p.
Geoffray
↑Le Bâtard de Kosigan, de Fabien Cerutti (2014-2018)
Envie d’une fresque Fantasy haletante, pleine de peps et de mystères ? Tentez Le Bâtard de Kosigan, et son monde de franco-fantasy diablement alléchant.
On y suit Pierre Cordwain de Kosigan, sorte de James Bond médiéval, à la fois chef d’une troupe de mercenaires, espion et chevalier sans terre, qui doit se dépêtrer d’intrigues politico-magiques dans une France du XIVe siècle qui ne s’appelle pas encore la France, et dans laquelle on croise elfes, nains et autres peuples magiques.
Mais on y suit aussi, entre deux chapitres dans lesquels Pierre tente de survivre à un tournoi un brin truqué (pour ce tome 1), Kergaël de Kosigan, son descendant vivant au XIXe siècle, dans un monde où magie et chimères ne sont que des contes de fées… à ce qu’il parait.
Le tome 1 du Bâtard de Kosigan est sorti en 2014, et ce cycle d’intrigue s’est terminé avec le Tome 4, sorti cette année.
Trois nouvelles se passant dans l’univers du Bâtard de Kosigan sont également lisibles dans les anthologies des imaginales 2016, 2017 et 2018.
Prix Futuriales Révélation 2015, Prix Imaginales des lycéens 2015.
- 2014 : L’Ombre du pouvoir, Mnémos (réédité en Folio SF)
- 2015 : Le Fou prend le roi, Mnémos (réédité en Folio SF)
- 2017 : Le Marteau des sorcières, Mnémos
- 2018 : Le Testament d’involution, Mnémos
DNDM
↑Aeternia, Gabriel Katz (2015)
Leth Marek, champion d’arènes, se retire invaincu, au sommet de sa gloire. Il a quarante ans, une belle fortune et deux jeunes fils qu’il connaît à peine. C’est à Kyrenia, la plus grande cité du monde, qu’il a choisi de les élever, loin de la violence de sa terre natale. Lorsqu’il croise la route du culte itinérant d’Ochin, une étrange religion menée par un homme qui se dit prophète, l’ancien champion ignore que son voyage va basculer dans le chaos.
Dans le panier de crabes de la Cité mère qui prêche la Grande Déesse, où les puissants du Temple s’entredévorent, une guerre ouverte va éclater entre deux cultes, réveillant les instincts les plus noirs. La hache de Leth Marek va de nouveau tremper dans le sang…
Aeternia est un diptyque qui alterne le point de vue de Leth Marek d’un côté, le combattant d’arène entraîné bien malgré lui dans une guerre de religion, et Varian de l’autre, le jeune prêtre du culte officiel, qui souhaite ardemment gravir les échelons.
Gabriel Katz traite ainsi au travers d’une écriture fluide, dynamique et subtile les questions de religion, sans mettre en avant l’une plus que l’autre. Chacune a ses bons côtés, mais aussi ses travers comme la manipulation des masses.
Aeternia est un bon roman qu’on lit d’une traite, le suspens étant bien dosé (je vous conseille fortement d’avoir le tome 2 à portée de main…). Les personnages sont vraiment bien travaillés, là où l’univers reste assez classique. Mention spéciale à Desmeon, un mercenaire charmeur et drôle qui offre un contraste intéressant avec l’homme bourru qu’est Leth.
Le second tome est du même niveau, un peu plus bercé dans la fantasy, et surtout il nous offre une fin digne de ce nom.
Namande
↑Conclusion
Nous espérons que notre sélection vous aura plu. Si vous êtes en panne de lecture malgré tous ces titres du mois, n’hésitez pas à consulter l’annuaire de toutes les recommandations publiées sur le blog de la Garde de Nuit.