La semaine du 4 au 8 mai s’est déroulé le colloque universitaire des Imaginales 2020 consacré à Game of Thrones : « Game of Thrones, nouveau modèle pour la fantasy ? ». En raison du contexte, il a été organisé sur la plateforme Zoom. Nous avons eu de bons retours de façon générale sur le colloque, et nous tenions à remercier les organisateurs techniques, scientifiques et tous les intervenants.
Pour ceux qui ont pu y assister, ainsi que pour ceux qui ont suivi nos comptes-rendus des interventions sur le forum, nous espérons que cela vous a plu ! Pour les autres, voici un petit résumé des différentes interventions, ainsi que l’enregistrement de la table ronde du dernier jour, qui réunissait deux membres de La Garde de Nuit (DNDM et moi-même) et deux universitaires. Pour information : les actes du colloque seront publiés aux éditions Actu SF l’année prochaine (les actes comprendront six communications supplémentaires par rapport aux interventions).
↑Lundi 4 mai : Une fin en trompe-l’œil
↑« A Song of Ice and Fire, un monde secondaire polysémique qui se joue des prophéties », par Thierry Soulard
Les prophéties sont un attendu des univers de fantasy, qui bien souvent n’en comptent qu’une, celle qui guidera le destin du héros. Dans Le Trône de Fer, les prophéties sont partout, et le lecteur n’en rencontre pas moins de 35, sous différentes formes (prophéties, prédictions, visions, rêves, etc.). Certaines résultent de phénomènes magiques, d’autres sont à la frontière du rêve et de la magie, d’autres enfin ont une utilisation politique. Elles ont un impact majeur sur les personnages et leurs relations. Mais souvent, dans l’univers créé par George R. R. Martin, ces prophéties sont trompeuses. « Les prophéties sont composées de mots, et les mots sont du vent » (ADWD, Daenerys IV).
Dans sa communication, Thierry Soulard s’est attaché à étudier ses prophéties et les outils utilisés par George R. R. Martin pour les construire : la réinterprétation d’éléments historiques, mais, surtout, la polysémie des mots.
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↑« Tout est bien qui finit… bien ? Pour une dialectique du cliché dans la fantasy de Game of Thrones », par Justine Breton
Dès les premières saisons, Game of Thrones s’est distinguée par son détournement des clichés du genre de fantasy : en s’appuyant sur eux, inspirés principalement de la littérature épique et des contes de fées, la série détourne peu à peu les pistes narratives et les parcours des personnages. Pourtant, les dernières saisons peinent à proposer une alternative, pour au contraire renouer à plusieurs reprises avec des schémas connus et datés.
Dans sa communication, Justine Breton se penche sur les parcours de plusieurs personnages de la série, pour étudier les pistes narratives proposées conjointement par Martin et les showrunners de la série, puis les choix opérés pour la fin de Game of Thrones : comment et pourquoi la fin de la série renoue-t-elle avec les clichés de la fantasy après les avoir savamment déconstruits ?
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↑Mardi 5 mai : Le réalisme historique en question
↑« Fantasy morghulis : l’assassinat de J.R.R. Tolkien. Du réalisme mortifère de A Song of Ice and Fire », par Marie Kergoat
J.R.R. Tolkien est la référence incontournable de fantasy, un modèle qui a une longue descendance. Pourtant, sa place sur le trône paraît bel et bien lui avoir été retirée par un autre auteur à qui on le compare : « le Tolkien américain », à savoir G.R.R. Martin. En proposant un nouveau modèle de « réalisme boueux », GRRM impose désormais de nouveaux codes, qui rejettent la magie aux marges d’un genre dont elle est pourtant l’essence.
Dans sa communication, Marie Kergoat s’attache à étudier les rapports qu’entretient George R. R. Martin avec l’œuvre de Tolkien, entre héritage, hommage et outrage, et se penche sur cette question du « réalisme » en fantasy.
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↑« La vérité est dans les archives : l’utilisation du matériau historique dans Game of Thrones », par Florian Besson
Bibliothèques et vieux grimoires dans lesquels les héros trouvent une vérité essentielle à l’intrigue sont des classiques de fantasy. Game of Thrones n’échappe pas à la règle, elle qui met en scène de nombreux moments dans des bibliothèques, de la discussion entre Sam et Jon à Châteaunoir, à celle où, dans la saison 7, Sam comprend l’ascendance de Jon Snow. La série pose ainsi la question de l’utilité de l’histoire dans cette saga à la narration éclatée entre les différents personnages, entre vérité des archives et le ressors narratif qu’est l’« histoire secrète » que les personnages découvrent au fur et à mesure.
Dans sa communication, Florian Besson s’attache à décrypter la place de l’histoire dans Game of Thrones, ainsi que le discours que la série porte sur l’histoire en temps que discipline historique.
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↑Mercredi 6 mai : Influences et postérité
↑« Généalogie du barbare et de la Frontière dans Game of Thrones », par William Blanc
Les Sauvageons, dans Game of Thrones, sont un peuple à part : vivant au nord du Mur, aux marges du continent comme aux marges de la conquête du pouvoir qui anime les Sept Couronnes, ils sont vus comme différents par les habitants du sud du Mur. S’ils ont été considérés comme une allégorie des réfugiés climatiques ou des migrants, il paraît intéressant de se pencher sur les origines de ce peuple et de sa représentation.
Dans sa communication, William Blanc s’attache à reconstruire la généalogie de la figure du barbare en fantasy et dans la culture populaire américaine, et à voir en quoi les Sauvageons de George R. R. Martin et ceux de Game of Thrones s’y rattachent et/ou s’en distinguent, en suivant deux pistes en particulier : le barbare germain de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge d’une part, et les Amérindiens, très liés aux notions de Frontière et de « peuple libre » d’autre part.
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↑« Fin de règne ? L’après Game of Thrones, pour HBO et pour la Fantasy », par Yann Boudier
En adaptant la saga littéraire de George R. R. Martin, HBO l’a fait sortir du domaine du « confidentiel » (qui avait tout de même un certain succès auprès des amateurs de fantasy) et l’a ouverte à un public plus large, ayant pour conséquence de décupler les profits générés par cette œuvre et d’élargir son public. Game of Thrones a donc permis à la culture populaire de s’approprier la saga Le Trône de Fer. Mais comment s’est faite cette appropriation ? Et que reste-t-il après cela ?
Dans sa communication, Yann Boudier revient sur le processus d’adaptation des livres de George R. R. Martin, s’interroge sur l’appropriation de l’œuvre d’origine par les standard d’HBO, et sur le futur des séries télévisées, à la recherche du nouveau Game of Thrones.
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↑Jeudi 7 mai : GoT en France, traduction et réception
↑« Patrick Marcel, le prisonnier du Trône de fer ? », par Vivien Feasson
Patrick Marcel est le deuxième traducteur du Trône de Fer : il a pris en 2011 la succession de Jean Sola, qui avait travaillé sur les quatre premiers tomes de la saga (les quatre premières intégrales), et avait livré une traduction sujette à de nombreux débats et controverses. Réputé doté d’un style « plus proche » de celui de George R. R. Martin, Patrick Marcel est-il un nouvel ambassadeur, ou bien n’est-il, au fond, que le prisonnier du Trône de fer ?
Dans sa communication, Vivien Féasson analyse la traduction de Patrick Marcel et son évolution, afin de voir comment il a pu concilier l’héritage de Jean Sola et la volonté d’être plus proche du texte de George R. R. Martin, tout en marquant son travail de son propre style.
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↑« La réception médiatique de Game of Thrones. Comment la presse écrite française s’est-elle saisie de la lutte pour le trône de fer ? », par Romain Mathieu
Game of Thrones est devenu, au fil des ans et des saisons, un véritable phénomène médiatique. Le nombre d’articles de presse consacrés à la série s’élève à plusieurs dizaine de milliers sur la période de diffusion de la série (2011-2019), et, en se restreignant à la presse quotidienne nationale française, à presque deux milliers. Un nombre d’autant plus impressionnant que les séries de fantasy (et de dark fantasy en particulier) sont traditionnellement bornées à une certaine niche culturelle.
Dans sa communication, Romain Mathieu se penche sur la presse écrite et sur la façon dont elle a abordé la série Game of Thrones à travers les ans, en suivant deux axes d’études : une analyse quantitative sur l’ensemble de la presse quotidienne nationale (entre 2011 et 2019) d’une part, et d’autre part une analyse sur le contenu de ces articles. La série est-elle cantonnée à certaines rubriques journalistiques, et peut-on constater une évolution de ce traitement ? Par quel(s) angle(s) est(sont) abordé(s) le succès de Game of Thrones ?
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↑Vendredi 8 mai : Table ronde « Experts et universitaires, tous chercheurs sur GoT » animée par Anne Besson
La table ronde qui a clôturé ce colloque avait pour objectif de réunir deux « familles », deux origines de l’érudition sur Game of Thrones / Le Trône de Fer : d’une part les « fans », dont La Garde de Nuit représente une bonne partie, et qui depuis des années relisent et interprètent l’œuvre de George R. R. Martin ; et d’autre part les universitaires, beaucoup littéraires et historiens (mais pas seulement), qui se penchent sur l’oeuvre et sur la série. Deux familles à la fois proches, aux frontières poreuses, mais aussi aux approches différentes et complémentaires.
La table ronde a donc réuni Justine Breton (maître de conférences en littérature française), Florian Besson (docteur en histoire médiévale), Aurélie Paci (doctorante, Garde de Nuit) et Thierry Soulard (journaliste, Garde de Nuit), et était animée par Anne Besson, professeur en littérature générale et comparée, bien connue dans le milieu des littératures de l’imaginaire, et également à la direction scientifique de ce colloque.
La table ronde a suivi trois axes :
- 1er temps : présentation des participants et de leur essai sur Game of Thrones. Les quatre participants sont en effet auteurs de deux essais qui auraient dû paraître ce printemps – la sortie est repoussée en raison de la crise sanitaire -, et ont parlé de leurs travaux : Une histoire de feu et de sang. Le Moyen Âge de Game of Thrones (à paraître le 27 mai, aux éditions PUF), pour J. Breton et F. Besson, et Les mystères du Trône de fer tome 2 : La clarté de l’histoire, le brouillard des légendes (à paraître plus tard, aux éditions Pygmalion), pour A. Paci et T. Soulard.
- 2ème temps : fans et universitaires. Comment les fans et les universitaires abordent-ils l’œuvre de George R. R. Martin ? Quels sont leurs méthodes, leurs centres d’intérêt ? Quelle(s) reconnaissance(s) ont-ils construite(s) au fil du temps ?
- 3ème temps : pourquoi Game of Thrones ? Qu’est-ce qui, dans les romans et dans la série, a attiré l’attention des fans, et des universitaires ? Et que peut-on conclure de ce colloque ?
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